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zvezdoliki
25 février 2005

parlons du chat aux parents

Hier soir (encoooore: ils sont tout le temps là à Paris, these days), dîner avec papa et maman.

Nouvelle contrainte oulipienne: à chaque fois qu'on se voit, tasser à mes parents, au détour d'une phrase, quelque chose sur *** (que j'appelle ici le chat). C'est utile quand la discussion devient trop animée, ça la fait retomber illico comme un soufflé au congélateur.

Hier soir, c'était donc, assez classiquement: "Oui, enfin tu sais, vivre dans moins de 200m², même pour une famille nombreuse, ça se fait: regarde la famille de ***, ils étaient 7 enfants et leur apparte de M faisait moins que ça."

Je vous raconterai la suite du feuilleton oulipien. La prochaine fois, essayer de caser chat+ congélateur. Mais sans préparer: comme ça, à l'inspiration.

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23 février 2005

Schönberg à la Cité de la Musique

Avant toute chose, je dois déclarer ma dette et ma flamme au site du Centre Schönberg à Vienne, qui est tout bonnement ce que j'ai vu de mieux en matière de site consacré à la musique. C'est vertigineux, il ya tout de Schönberg, à écouter, à voir et à lire. Il y a même une radio. Je sens que je vais y passer de longues soirées d'hiver. Tous les extraits musicaux en lien dans cette note proviennent de ce site magique.

Hier soir, concert Schönberg/ Wagner à la Cité de la Musique, un concert exceptionnel par son exigence artistique, sa cohérence et sa variété, grâces en soient rendues à Michael Gielen et le choeur et l'orchestre symphonique de la radio de Berlin. Un échantillon finalement assez complet de l'oeuvre "à texte" de Schönberg. Des oppositions violentes: les longues plages sensuelles et sacrées du Parsifal et le foutoir innommable de la scène du Veau d'Or; l'idéalisme de Paix sur terre et l'horreur concrète d'Un Survivant de Varsovie......Mais aussi la variété dans le traitement vocal (opéra, mimodrame, choeur en chanté-parlé, choeur a cappella) et dans les styles (sériel-néoclassique pour Moïse et Aaron (1930), tonal pour Paix sur terre (1907), atonal athématique pour La Main heureuse(1913), sériel bruitiste pour Un Survivant de Varsovie(1947)). Première écoute pour moi de La Main heureuse et du Survivant de Varsovie.

Prélude de Parsifal. Direction précise de Gielen pour une musique qui flotte, avec ses longs accords chatoyants. Le programme cite pertinemment Wagner qui disait du Prélude qu'il était un exorde, "comme l'exorde d'un sermon, les thèmes sont simplement mis les uns après les autres".

Friede auf Erden: une pièce chorale de 1907, encore tonale, un ré mineur qui devient majeur. Enchaînements harmoniques étonnants, à l'extrême fin. Dommage que le choeur ait été doublé par les cordes, localement, sans rester strictement a cappella.

A survivor from Warsaw. Un grand choc pour moi, une musique d'une efficacité redoutable, directement émotionnelle, notamment le crescendo accumulation de rythmes, à partir d'un accord pianissimo aux cordes (qui évoque le gaz), sur ce texte: "In einer Minute will ich wissen, wieviele ich zur Gaskammer abliefere! Abzählen!" They began again, first slowly: one, two, three, four, became faster and faster, so fast that it finally sounded like a stampede of wild horses, and all of a sudden, in the middle of it, they began singing the Sema’ Yisroel. Trois langues: l'allemand (la langue du tortionnaire), l'anglais (la langue du survivant), l'hébreu (la langue des morts). Impression curieuse de voir un orchestre allemand se faire ovationner avec cette musique....

Die glückliche Hand. Une pièce de la grande période des pièces de l'opus 16 (qui m'excitent), et d'Erwartung (qui ne m'a jamais excité). La version de concert permet d'évacuer le problème insoluble de la représentation de ce qui peut se passer en 20 minutes dans la tête d'un baryton (dont la femme est attirée par un dandy et dont l'art est incompris....). Musique raffinée; orchestre éléphantesque traité comme un ensemble de chambre; très proche de Mahler, finalement. Grand coup de marteau fécond, comme dans la VIème de Mahler, qui conduit à une cristallisation, puis à un incroyable crescendo de couleurs.

la scène du Veau d'or dans Moïse et Aaron: La musique du début, marche vulgaire avec ses archets jetés. Couleur du piano, percussions éléphantesques. Etonnante fin, dispersion !

8 février 2005

autour d'un trio des Noces

A ceux qui croient encore, naïfs hirondeaux nourris au lait du Conservatoire, que la forme sonate est ce carcan académique dont les vaillants novateurs des XIXième et XXième siècle ont su s'émanciper, on conseille d'aller écouter sur la radio le merveilleux terzetto de l'acte I des Noces de Figaro de Mozart: tout le contraire de l'académisme, de la forme en action, toute vivante et palpitante. En un peu moins de 5', c'est une forme sonate aussi complexe qu'un premier mouvement de symphonie qui surgit, qui souligne finement une histoire tragico-burlesque de double sortie d'un placard. Une forme sonate, c'est cela: exposer des tensions, des dissonances, puis les résoudre, après les avoir révélées.

La situation est la suivante: à la scène précédente, Basile, manoeuvrant pour le Comte, essaie de faire chanter Suzanne en insinuant qu'elle se laisse courtiser par Chérubin. Au tout début de la scène qui nous intéresse, le Comte, qui a tout entendu, sort de sa cachette, furieux, jaloux et dominateur, prêt à tout pour confondre l'impudent Chérubin (qui, en fait, rêve à la Comtesse). Basile cherche à renforcer son avantage, à sa manière torve. Mais la scène se corse : le Comte, en racontant et mimant comment il a démasqué Chérubin, quelque temps avant, finit par le dénicher...sous un autre fauteuil. A la fin de la scène, Suzanne est catastrophée, Basile triomphe et le Comte tonne. Vous suivez ? sinon, le livret est ici..

Toute la scène fonctionne musicalement sur des idées très simples, comme toujours chez les classiques, tellement banales qu'on risque de ne pas les repérer..... Comme principaux ingrédients de la scène, j'entends la cadence fa-si bémol (qui ouvre la scène), un rythme modulant caractéristique qui revient aux moments cruciaux (associé à l'idée de manigance, on le voit sur la partition ci-dessous), un rythme pointé, plus martial et moins crucial, qui est associé au Comte (c'est juste avant).

Et maintenant, le topoguide, avec les dénivelés et tout et tout:

Exposition: du début à 1'25''. Première note: un fa.... qui est une dominante, en fait. On est en si bémol. Comique du style classique: le thème initial n'est qu'une cadence (comme le finale de l'opus 76-5 de Haydn, aussi dans la radio), pire encore, pas même une cadence parfaite. Une décadence. Je signale juste en passant (ça servira plus tard) que cette cadence intervient à la première sortie de placard (introducing le Comte)

à 2": le voilà, le comte, en si bémol, avec son rythme pointé (c'est un seigneur qui tonne, et dialogue avec les violons)

à 20": le rythme de Basile, dont je parlais, modulant, très repérable;

à 28": musique dramatique et bouffonne à la fois: Suzanne se lamente en do mineur (qui annonce fa, évidemment)

à 55": musique de conclusion en fa majeur (très romantique avec ses accents, ses chromatismes et les violons qui s'excitent, on y retrouve le rythme de Basile).

Développement

1'21": on module en ré puis en mi bémol; sur la musique de la conclusion, puis le rythme de Basile, qui nous mène en fa (fatal).

Réexposition

2'05": c'est la musique du début, mais qui prend tout son sens avec les voix (et plus seulement le Comte et les cordes). Un savoureux "quoi quoi quoi" suspensif de Suzanne, sur fa, mène à une....

2'30" ...extraordinaire cadence (à tous les sens du terme, comme dans un concerto....). Temps suspendu; le temps du récitatif est celui de la narration, du souvenir, mais celui-ci reste en cohérence avec la forme sonate: le thème rythmique cette fois-ci nous ramène à bon port, sans galéjer avec des chromatismes.....sur une cadence, qui coïncide avec la sortie de Chérubin de sa cachette (comme le Comte au début de la scène). Cosa Veggio, chante le comte, effaré: la bête est dans la nasse (en si bémol).

3'21": On est bien en si bémol, tout est résolu: Le rythme initial se retourne contre Suzanne (le Comte lance un ironique "Onestissima Signora") Suzanne est une menteuse confondue, le Comte est décidé à punir Chérubin.

Cette note est un essai, à tous les sens du terme....un peu bâclé, mais je voulais parler différemment d'une musique qui est à la fois plus primesautière et complexe qu'il n'y paraît. Je ne recommencerai pas, c'est promis. Evidemment en misérable ver de terre, je dois tout au plus beau livre jamais écrit sur la musique, le Style classique de Charles Rosen (mon idole), qui ne parle pas de ce trio mais analyse le sextuor de l'acte II, avec ses "Ciel ! Maman ! Ciel ! Papa !".

1 février 2005

J'étais dans ma maison et j'attendais que la pluie vienne, de Jean-Luc Lagarce

Vu samedi avec N et le chat (inconditionnel de JLL) la pièce de Lagarce à l'affiche à la Cité U. La pièce, l'une des dernières de l'auteur qui est mort du sida en 1995, est davantage de la musique de chambre que les Prétendants, cette comédie grinçante du monde du travail, et plus un psychodrame bergmanien que Derniers remords avant l'oubli qui était souvent très drôle et dont j'ai un souvenir très ému. Elle montre cinq femmes d'âges divers face au retour du fils de la famille, à l'agonie et absent de la scène, dans la maison familiale dont il a été chassé, il ya longtemps, par son père. Mais elle est aussi une chronique de la vie de province, de la campagne de l'est de la France. Lagarce est du Jura et la pièce a été montée au théâtre du peuple à Bussang, ce beau théâtre à l'allemande qui ouvre sur la forêt, dans les Vosges (....je rêve d'y voir la bataille d'Arminius). La langue est belle, toute de ressassement, presque du Thomas Bernhardt, en moins tendu. Elle supporte assez mal une mise en scène qui en fait trop. Pas vraiment emballé par Cécile Garcia-Fogel dont le personnage est pourtant bouleversant: celui d'une femme de 35 ans qui s'est fait à des amours de passage avec des hommes mariés qui ronflent avec leurs chaussettes. Mais je me souviendrai d'une grande scène de théâtre, au milieu, quand Catherine Hiegel rugit pour rétablir la vérité, et se défend comme une lionne contre la benjamine qui provoque ses aînées en leur reprochant de ne pas avoir su prévenir le drame.

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