Que des femmes, Toutes ses femmes a-t-on envie d'écrire. Voilà un opéra où Barbe-bleue chante trois notes et disparaît à la fin du premier acte après avoir été ficelé comme un poulet rôti, et où les femmes ont le premier rôle… les sept premiers rôles, au moins, parce qu’il y a aussi cette froussarde de Nourrice (d'aucuns murmurent que c’est un homme, Paunova dans l'enregistrement canonique ne fait rien pour lever l'équivoque). Si l’affiche est réussie, c'est qu'elle dévie de l’imagerie Maeterlink (dont je ne conteste pas les mérites), en mettant l'accent sur ces cinq (ou six, c'est comme les trois mousquetaires) femmes qu'Ariane libère - avec quelle énergie ! - et qui finissent, ces irrécupérables, par refuser leur liberté. Le barbu de l'histoire, Dukas qui tire les ficelles en coulisse, libère les couleurs, lui. Il organise son premier acte bien différemment de Bartok, avec un sens aigü de la trajectoire harmonique et chromatique qui nourrira son élève Messiaen. Le coeur de cet acte est une série de variations sur le thème d'Ariane, celui de la lumière. A chaque porte correspond une couleur et une tonalité. La sixième porte ouvre sur les diamants, la lumière blanche la plus riche, la plus aveuglante, dans la tonalité de fa# majeur (six dièze) pour le grand air d'Ariane. Vivement de pouvoir l'entendre à la Bastille (il faudrait quand même que j'aille voir s'il y aura des places avant de contribuer à faire se remplir la salle !).