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zvezdoliki
10 octobre 2011

Tannhäuser

Retour sur un amour de jeunesse. Eh oui, j'ai dû diriger l'ouverture de Tannhäuser sur ma descente de lit en ventilant avec ardeur ma chambre, à l'époque des premiers boutons. Je n'ai même pas le disque à la maison et je ne me souvenais presque plus de rien. Enfin, ça a bien dû infuser sans que je m'en rende compte car j'avais forcément en tête deux des morceaux de bravoure de la pédéwagnérovénénotitude, la  Romance de l'étoile qu'a pillée Visconti dans Ludwig (dans une version décolorée et dépressive, au piano, comme une boîte à musique qui tourne à vide); et puis la marche des pélerins, inoubliable dans la version synthétiseur disco gay d'Encore, le film de Vecchiali.

Une oeuvre de 1845. Eh oui, Wagner a été jeune, et a vécu ce premier romantisme, ce premier 19ième siècle impossible, à machins amphigouriques, à rédemptions retardées et bordels rougeoyants. Dès le début, on se croirait chez Berlioz - la marche des pélerins rappelle la scène finale de Roméo (l'entrée du choeur dans Jurez donc, par l'auguste symbole avec le rythme à 12/8 des violons, à 1'53"), et chez Mendelssohn (bacchanale). C'est l'époque où on ne recule devant aucune outrance, aucune formation bizarre (le septuor de voix d'hommes ! le finale du deuxième acte! les grands airs accompagnés à l'(unique) harpe solo, comme si on était en direct de chez le barde.... tout cela rend l'IRCAM et ses formations Pierrot lunaire si fâcheusement conventionnelles). Mais on a aussi le plaisir de deviner ce que va devenir Wagner (les plaintes sur des accords neuvièmes des accords du Venusberg; le récit par Tannhäuser de son voyage à Rome, du niveau des grands récits de la Tétralogie). Pas encore ou peu de leitmotive, mais un traitement subtil des morceaux de bravoure: au milieu du premier acte, la marche des pélerins mixée avec la musique printanière de mai qui précède juste (encore une idée à la Berlioz); au troisième acte, exposée au choeur à 4 voix a cappella ou à l'unisson, avec cet incroyable crescendo.

La mise en scène évacue totalement la dimension rédemption/ grâce au profit d'un discours sur l'art, comme si on était dans les Maîtres chanteurs. Cela fonctionne assez bien, sauf la fin qui m'a semblé vraiment forcée (la muséification de l'Origine du monde, c'est un peu trop). La scène du retour des pélerins de Rome est magnifique visuellement (l'accumulation de ces cadres dépouillés des toiles qu'ils soutenaient, une forêt dans laquelle se perd Elizabeth, hagarde), mais je crois que je n'aurais pas compris la symbolique si on ne m'avait pas expliquée (les toiles= les péchés). Distribution remarquable (Christopher Ventris en grande forme, Nina Stemme et Sophie Koch sont les deux muses, Stéphane Degout en Wolfram)

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