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zvezdoliki
22 mai 2006

encore Dialogues

Revu chez Kozliquette (qui a des ambitions pour moi, aïeaïeaïeDialogues des Carmélites, enfin, le DVD de la version Opéra du Rhin mise en scène par Marthe Keller.

Je relis mes notes de la dernière fois ; s'il est difficile de rater cette figure ascendante qu'on entend de part en part dans l'opéra, on entend aussi tout au long de l'oeuvre une figure descendante, composée d'octaves (la grâce qui est donnée ?) ; par exemple à la fin, quand Blanche vient prendrein extremis le relais de Constance : la descente d'octaves brise le cercle infernal des tierces qui accompagnent le Salve regina (hoplageiss! c'est dans la radio, à 5'13").

Chez Marthe Keller, la première scène entre Blanche et Madame de Croissy (Nadine Denize) est d'une dureté incroyable ! Un examen de passage terrible, s'interrompant sur le choc que constitue pour la Prieure la révélation du choix du nom de Blanche de l'Agonie du Christ. Belle scène aussi, plus tard dans l'opéra, celle où le chant de Madame Lidoire, rassurant et maternel, conforte les Carmélites condamnées : dans cette mise en scène, elles se passent un bâton de suie noire et dessinent chacune une grande croix noire sur leur vêtement, signe d'acceptation du martyre. C'est beau comme une démonstration par récurrence.

A propos de Madame Lidoire, il faut lire ce texte magnifique de Jérôme (c'est en bas de la page et il ne faut pas avoir peur des hurlements de la Tosca - elle ne mord pas) ; il est vraiment inspiré par cesDialogues.....

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4 mai 2006

Siegfried (reloaded), au Châtelet

Mêmes interprètes, même production, mais je suis attentif à autre chose :

Siegfried Mime : A chaque fois que Mime introduit un thème (l'amour dans la première scène, la peur dans la troisième), Siegfried s'en empare pour infléchir le discours musical. L'amour qui, chez Mime, est mielleux devient avec Siegfried une grande idée lyrique renvoyant aux Wälsungen et à la mère inconnue. La peur, qui pour Mime est une terreur de dessin animé, se transforme pour Siegfried en le pressentiment de la conquête de Brünnhilde (programme de l'opéra), exprimé uniquement par la musique (et pas par le livret). A l'acte II, quand Mime profère à part ses menaces contre Siegfried, sur une musique de valse un peu doucereuse (avec gruppettos, un XVIIIème siècle un peu malsain), il croit que Siegfried ne le comprend pas ; grave erreur, Siegfried comprend maintenant à la fois le chant de l'oiseau (c'est pourquoi on entend abondamment son thème, déformé dans la valse) et le double discours du Niebelung, tout comme le spectateur, qui se dit que décidément ce Mime est bien bête. L'Oiseau (dans cet acte II où j'avais tant dormi) est ce passeur entre l'image de la mère inconnue et la femme qui attend dans le brasier final.

Le thème des traités = celui de la contrainte, tout court. Est cité dans le jeu des questions/ réponses entre le Wanderer et Mime, revient dans la scène terrible où Siegfried, symboliquement, tue le pèresur la route de Delphes avant d'aller coucher avec sa mère décongeler sa tante. A ce moment précis, le thème des traités est désintégré : cette gamme descendante part en vrille chromatique.

A chaque acte, l'oreille est sollicitée par des marqueurs sonores qui reviennent fréquemment. A l'Acte I, ce sont deux septièmes descendantes, particulièrement sinistres (= le destin ?) ; à l'acte II, c'est le triton du dragon, aux timbales, stable et sourd.

A l'acte III, pile dans mon champ de vision, je vois un percussionniste s'échiner sur une grande feuille de papier (comme dans Rameau), qui fait concurrence à la soufflerie du Châtelet, toujours déchaînée. Cet instrument intervient dans le prologue et dans la scène Wotan/ Siegfried, au moment où la lance de frêne du Père est sectionnée par l'épée du fils.

Les 45 minutes finales, toujours aussi assommantes, passent avec un bon chronomètre et un soupçon de mauvais esprit. Il faut 10 minutes à notre héros pour se rendre compte que Brünnhilde n'est pas un homme (Great! good boy !) ; 10 autres minutes pour surmonter sa panique (aaargh une femme, que vais-je donc en faire). Elle se réveille enfin, ils commencent par détailler leurs pedigrees respectifs, comme dans le carnet mondain du Figaro (tout va bien, nous sommes en bonne compagnie). Il la complimente sur son haleine (voilà quelqu'un qui sait parler aux femmes). Elle se définit en quelque sorte comme sa carte mémoire (toi et moi c'est pareil, mais moi je me souviens). J'exagère vraiment ?

13 mars 2006

L'Amour de loin, de Saariaho au Châtelet

En premier lieu attiré par le sujet de l'opéra, inspiré des poèmes de Jaufré Rudel, seigneur de Blaye et l'un des grands troubadours de son époque, le chantre de l'amour de loin. La légende affirme qu'il est tombé amoureux à distance, après une vie aventureuse, d'une dame de Tripoli, pour qui il a écrit des chants d'amour et qu'il n'a rencontrée que mourant, au terme d'une grande traversée de la Méditerranée en bateau ("avec la voile et la rame à la recherche de sa mortécrit Pétrarque).

D'après ce que j'en ai lu, Jaufré Rudel est un poète moins hermétique que Raimbert d'Orange, le poète de la fleur inverse du livre de Roubaud ; si je parle de Roubaud, ce n'est pas que par hystérie de fan-de-JR, c'est aussi parce que Saariaho lui a emprunté le titre de son concerto pour violon (Graal Théâtre) - et lui a fait dire les vers de Jaufré Rudel en provençal dans la bande électronique de Lonh, une oeuvre écrite pour Dawn Upshaw et manifestement une des matrices de l'Amour de loin.

Donc, sur le papier, un projet très excitant : l'Orient/ l'Occident, le texte/ la musique qui transforme la vie, l'amour/la mort/la mer, mais qui a été affadi par le livret, la musique et la vidéo...

Le livret de Maalouf a quelques qualités - il est notamment centré efficacement sur trois personnages (Rudel, sa dame et le Pélerin : le go-between, l'entremetteur, de loin le personnage le plus intéressant de l'opéra, magnifiquement incarné, samedi, par Marie-Ange Todorovitch). Mais, le texte, pas ésotérique pour un sou, a tendance à trivialiser son sujet : un abus de certaines figures rhétoriques, comme des croisements sur le mode: les hommes affichaient la terreur et les femmes l'envie, à moins que ce ne soit l'inverse; une tendance au bavardage qui parfois prête à sourire (comme cette scène où Clémence explique qu'elle n'a pas encore commencé à souffrir.....). La vidéo de Barrière était au mieux inutile, au pire nuisible, dans la mesure où elle dispersait inutilement l'attention du spectateur. Très illustrative (les visages des chanteurs pixellisés....), elle souffrait largement de la comparaison avec le Tristan de Viola....

Quant à la musique de Saariaho, elle ne m'a pas semblé passionnante. Elle use et abuse d'effets faciles comme les nappes de sons (qui ne s'interrompent même pas au moment de la mort de Rudel) ou les appels de vents. L'usage de l'électronique est anecdotique et très peu audible. La prosodie française n'est pas très heureuse (les syllabes muettes sont mangées) et la vocalité un peu planplan si on excepte quelques envolées de Clémence (reste à imaginer ce que Dawn Upshaw a pu en faire....). Je retiens quelques moments, peut-être faciles mais qui restent en mémoire : la chanson strophique de l'amour de loin, le début marin du IVième acte (sol-ré-la-do-fa, si je me souviens bien....), l'extrême fin - l'amour de loin sublimé dans l'amour de Dieu - avec le contraste entre les cordes suraigües, métalliques, et l'extrême grave. On sort de là avec l'envie d'écouter quelque chose de plus consistant - du Szymanovski, du Messiaen....

Et puis, aussi, en codacarambar :

  • - Mais faites-moi un piano sonoro, enfin ! - heuuuuu....
  • une devinette: qu'est-ce que les harpistes emploient comme plectre ? - réponse: leur serre-tête....

13 février 2006

Götterdämmerung, au Châtelet

  • Vivent les opéras le dimanche après-midi, j'étais frais comme un gardon et je n'ai pas perdu une miette de ces 6h30 de Crépuscule des Dieux, le meilleur de la Tétralogie, un vrai torrent de musique (même si nous étions hypermalplacés : très en haut tout à gauche, avec une vue plongeante sur l'orchestre : quel spectacle....)
  • Avec le Prologue et le 1er acte, on est d'emblée dans une telle splendeur musicale, dans une telle forêt de leitmotive - parfois trois ou quatre à la fois, avec des variations d'humeurs très rapides - qu'elle décourage le compte-rendu. Visuellement, choc plastique avec les Nornes (aux mains en formes de ramure et liées par un voile commun) et très beau début du 1er acte à la cour des Gibichungen (Hagen, lance rouge, mains rouges). La première apparition sonore de Siegfried à la cour des Burgondes: du thème de cor dérive une série de groupes de deux quintes descendantes qui s'enchaînent et se développent.
  • Si Siegfried est un opéra à interrogatoires, le Crépuscule est un opéra à serments (d'ivrognes) et unissons dissonants: un Siegfried (sous influence)/ Günther, un Siegfried/ Brünnhilde qui tourne au vinaigre (avec triolets modèle symphonie Italienne pour faire gagner Brünnhilde), un triple et vénéneux Brünnhilde/ Hagen / Günther (où un seul sur trois - le méchant- est lucide).
  • Au deuxième acte, mon moment préféré est la scène Alberich Hagen (un Kurt Rydl splendide bien que patraque)- la rencontre au sommet de deux animaux antédiluviens pour reprendre le mot de Wagner. Hagen, un roc de haine, immobile, comme sous hypnose....(Sei treu...) Instabilité de la rythmique des cordes, qui chaloupent en syncopes, avec en arrière plan les cuivres dans le grave. Plus tard dans l'acte, le choeur d'hommes, splendide, avec Hagen qui tire les ficelles. J'ai encore dans l'oreille ce do bécarre, trémolo, sauvage, insistant, des cordes, qui frotte sans concession avec un réb dissonant: la mort.
  • Le troisième acte démarre sous le signe du gibier d'eau, avec les filles du Rhin en oiseaux de malheur. C'est une scène curieuse, qui était très gracieuse chez Wilson hier : légère et fantasque, elle contraste avec ce qui va suivre, l'artillerie lourde de la tragédie. J'étais heureux aussi de redécouvrir la scène suivante : le récit de Siegfried, qui ne retrouve le souvenir de ce que chantait l'Oiseau qu'à l'aide du contre-philtre de Hagen- et retrouve ainsi le fil perdu du troisième acte de la Journée précédente, Siegfried. (Shorter du Crépuscule des Dieux: c'est le drame d'un héros qui perd la mémoire et ne reconnaît plus ce que chante l'Oiseau). Je me souvenais bien de la dernière demi-heure (le sommet final des adieux de Brünnhilde); en revanche, j'ai dû vérifier que le cycle finissait en réb (et pas en mib comme le prélude de l'or du Rhin : pourquoi pourquoi pourquoi ?).

Vivement le prochain Ring (dans 11 ans ?) : je me fixe comme objectif d'être alors un aussi bon interprète des intentions de Wagner que Siegfried avec l'Oiseau....(comment comment comment ?avaler un philtre ? des pages de leitmotive ? des graines ? )

 

9 février 2006

Siegfried, au Châtelet

Hier au Châtelet (avec A***).

  • Une remarque d'ensemble: on peut penser ce qu'on veut de la mise en scène, mais je la trouve souvent très en phase avec une musique qu'elle sert bien.
  • Adoré le 1er acte. La musique y est tonique, brillante, gaie et souvent drôle, comme dans cettescène où Mime essaie de flanquer la frousse à Siegfried en se faisant passer pour Hulk. Et souvent intelligente, aussi : frappé par l'irruption, à la fin du prélude, du thème de l'épée, un do majeur qui jure avec une tenue de sib (on est en fa mineur) : il est difficile de trouver une illustration plus convaincante de l'impossible soudure.....
  • J'ai un faible pour la 2ième scène, celle où les deux pères (le fourbe envieux et le potentat masqué) se balancent à la figure, avec un succès inégal, des questionnaires oedipiens. Une scène où s'opposent deux musiques: l'une, modulante et hiératique, de Wotan, et celle agitée et grotesque, de Mime (Boulez dit qu'il dirige Wotan à 2 et Mime à 4). Cette opposition était très bien rendue par une mise en scène qui traite Mime comme une marionnette se mettant en branle à chaque question. Le Voyageur (Wanderer) = Le roi des métamorphoses (Verwandlung), des modulations (ce sublime thème d'accords chromatiques qui tournoient, comme au moment de vertige d'une passacaille) ?
  • Grosse fatigue au 2ième acte. Mais ont émergé, comme dans un rêve : les Murmures de la Forêt (peut-être ce qu'il y a de plus beau dans Siegfried, cette musique toute simple qui chante la nature.....) ; la scène où Mime essaie de prendre le heaume à Siegfried (qui évoque irrésistiblement la scène de Klaus Narr dans la IIIème partie des Gurrelieder) ; et puis, ces tubas-dragon qui rampent dans le grave....
  • Au 3ième acte, le prélude (avant la belle scène Erda-Wotan) est un fantastique emboîtement de leitmotive : on entend de la Walkyrie encastrée dans de la colère des Dieux (tout comme on avait entendu le Wanderer walkyrisé à l'acte II): c'est une colère solide comme une coque de bateau. Un autre grand moment: quand Siegfried rentre dans le cercle magique et s'approche de Brünnhilde, Wilson ferme puis réouvre la scène par un mouvement latéral du rideau de scène, qui coïncide avec la belle ligne des violons, seuls, qui monte, puis, touchée en vol par un bout de leitmotiv (le Tarnhelm ?), redescend (avant un troisième aller-et-retour, celui des deux clarinettes). Un peu hébété après 5 heures de spectacle, je reste toujours aussi insensible à la musique de la lente décongélation de la Walkyrie (lente pour des questions de cuisine sans doute), pas du tout pimentée par une mise en scène plus-que-lente.
  • Rien à faire, je trouve toujours détestable cette représentation enthousiaste du meurtre des pères et de l'arrogance de la jeunesse ; je n'arrive pas à me s'abstraire de l'idée que Siegfrieda dû être du pain bénit pour les nazis....Mime, d'accord, l'a peut-être bien cherché mais Wotan aussi est très en position de faiblesse dans cette scène obscure du 3ième acte....
  • Add: je mets dans la radio un assortiment Siegfried - en fait des morceaux commentés plus haut, le Prélude le l'acte I (avec l'épée à 3'35"), le début de la scène du Voyageur avec Mime; à l'acte II, un bout de la scène des Murmures de la forêt, un bout de la scène finale Mime/ Siegfried; à l'acte III, le prélude puis l'introduction de la scène du réveil de Brünnhilde (avec la ligne sinueuse des violons). Et quelques échos: la scène de Klaus-Narr dans les Gurrelieder et la scène des trois coups de l'ange qui cherche à rentrer dans le monastère, au tableau 4 de Saint-François d'Assise de Messiaen.

 

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30 décembre 2005

L'amour des trois oranges, de Serge Prokoviev

Curieux spectacle: un livret au troisième degré (c'est une parodie de parodie) et une musique qui est souvent au premier degré, oscillant entre sarcasme et merveilleux, sans la noirceur qu'y mettrait un Chostakovitch ou un Britten. Il n'y a qu'à écouter le Prince chanter son amour des oranges: le texte est grotesque, la musique - lyrique, oui Madame- ne l'est pas. La célèbre musique de la Marche fait le même effet qu'un morceau de munster une fois qu'on l'a touché: impossible de l'oublier; mais il y a d'autres moments plaisants et plus subtils (les deux crêpages de chignons entre magiciens concurrents : ça tricote sec à l'orchestre, avec des col legno et tout et tout ; le scherzo avant les oranges). Le texte français semble tout droit sorti d'une traduction automatique, ce qui ne devait pas poser de problème aux russes émigrés à Chicago qui étaient à la première, mais laisse parfois rêveur: mais que sont donc ces vers martéliens ? (google, toujours bon garçon, propose de changer en vers martiens). Mention spéciale pour la cuisinière, aussi baraquée que Fafner et aussi mobile que ces trucs de TP de physique en 4ième (les mobiles Jeulin je crois).

Autre rencontre de sphères après le spectacle (je laisse aux experts le soin d'en faire lacartographie; je constate qu'effectivement je suis souvent à l'extrême gauche en compagnie de matoo - grand rire sardonique). Avec, donc, la fée KozlikaVroumette et son grand Vroum, Gilda, ladangereuse trilingueM le maudit, Etienne, Shaggoo et son homme, et Matoo que je lis depuis longtemps et que j'étais curieux de découvrir en vrai. Petite pensée pour Oli et M. Gv qu'on reverra à Rigoletto en février, j'espère. Le Vrai Parisien, s'était trissé fissa après l'opéra, prétextant une passion subite et irrépressible pour les Normandes (à d'autres). Sous le chauffage de la terrasse, nous nous sommes vite transformés en croque mademoiselle monsieur (le haut grillé, le bas frigorifié). Une révélation fracassante : Kozlika a confié à un journal letton qu'elle blogue trois heures par jour ; et bien.....roulement de tambours, page de publicité.....tadam tadam... en exclusivité je suis capable de révèler que... c'est plus oui c'est plus.

Pour rester dans les Prokoviev, je mets dans la radio le 1er mouvement du 1er concerto pour violon (pour le merveilleux) ainsi que le finale du second (pour les sarcasmes).

14 décembre 2005

Boris au Châtelet, dans la version de l'opéra Mariinski

 

  • Mardi au Châtelet, Boris Godounov. Dans la première version de Moussorgski : plus courte quecelle vue en mai à Bastille, aussi resserrée que l'Or du Rhin, sans entr'acte. Elaguée de l'acte polonais (qui de toutes façons ne sert à rien), et avec une scène d'épouvante de moins pour Boris (la première) - et aussi beaucoup moins de sixtes majeures et de cloches. L'opéra clôt sur la mort de Boris et pas la scène de l'idiot, une fin anesthésiée à la Wozzeck que je regrette.
  • En plus des grands moments habituels (le sacre avec les cloches et l'angoisse au coeur; la mort de Boris; la scène de l'idiot), surtout sensible cette fois encore à la scène du monastère. Dans cette production, un décor unique est installé avec le sacre de Boris, un décor qui disparaîtra avec le tsar, figurant aussi bien le palais que le monastère du vieux chroniqueur et de l'imposteur. De ce fait, on est tenté de voir en Boris et Grigori des jumeaux, les seuls à être vraiment hantés par le destin du tsarévitch assassiné, à vouloir habiter à l'ombre de ces tours oniriques et sous la menace de cette lampe/mamelle/méduse (venue de On connaît la chanson ? qui finira par subir un court-circuit provoqué par un pizz de contrebasse, ffffortissimo). D'ailleurs, les tsars finissent moines (c'est Pimène qui le dit) et l'histoire de Grigori montre que la transformation inverse est possible. Le vêtement du sacre de Boris, une cage (dans lequel celui-ci meurt et qu'il partage avec un autre enfermé, l'idiot), Chouiski finira par la destiner à Grigori....
  • Dans cette scène du monastère le fil rouge des violoncelles

c'est vraiment Pelléas, non ?:

(j'étais bien content d'avoir retrouvé la trace de ce passage, d'autant qu'en entendant mardi soir la scène du monastère, je me suis dit à cet endroit-là: mais c'est bien sûr, c'est Pelléas ! mais où ? A la réécoute je ne suis plus si sûr : chez Debussy le tempo est beaucoup plus agité)

  • La Lituanie: la contre-Russie, l'empire du Mal. Une vraie litanie: 1) Chouiski a gagné autrefois la bataille de Lituanie, 2) le contre tsar file vers la Lituanie, 3) Boris conseille à son héritier de se méfier de la Lituanie,....
  • Au chapitre des bizarreries de cette représentation, des décors et costumes souvent laids (les impers en plastique transparent permettent bien de faire patouille patouille dans la bassine pour la chanson du canard, mais sinon...). Un Boris jeune, plutôt good-looking, qui vient saluer comme une rock star, sûr de ses effets (du coup...méfiance). Direction très spectaculaire de Gergiev (lui aussi une star), qui prend la chanson de Kazan à un train d'enfer et pousse l'orchestre au bord de la sortie de route (il n'y a pas qu'aux amateurs que cela arrive...)
28 octobre 2005

la Walkyrie au Châtelet

  • Mangé un falafel au 1er entr'acte, bu un Schweppes au second; j'ai dormi au 2nd acte, j'étais frais comme gardon au 3ième. Une conclusion doit être tirée, mais je ne vois pas laquelle.
  • L'ouverture: pas un poil de graisse avec le motif nerveux des basses. Localement, le souvenir de l'orage final de l'or du Rhin.
  • au milieu de l'air du Printemps: Sieglinde essaie de se souvenir d'où elle connaît cet étranger. Musique qui module, pédale interrogative, thème des Wälsungen évoqué, comme en off. A réécouter plus en détail.
  • Au moment de l'extraction de l'épée (un passage qui peut tourner à la fête de la bière): orchestre diaphane, harpes, bariolages des violons sous les cuivres.
  • Côté scène, des beaux éclairages dans ce 1er acte.
  • 2ième acte: belle scène avec Fricka. Après, j'ai dormi quasiment jusqu'à la fin, réveil avec la rage froide de Wotan contre Hunding: Va! esclave, va dire à Fricka que tu l'as vengée de Wotan.
  • 3ième acte: pourquoi Wotan est-il si remonté contre Brünnhilde ? Tu as réalisé le rêve que je m'interdisais. J'aime particulièrement la musique de la supplique (tire larmes ?) de Brünnhilde, surtout le début a cappella avec ses sauts de septième.
  • Le rythme du thème des Walkyries: exactement celui des Niebelungen (qu'on a encore dans l'oreille !): l'antidote ?
  • la fin superpose (entre autres) le thème de Siegfried (stay online !) au motif du feu ("l'idée du feu paradoxalement associée à celle du scintillement de la douceur, et non à une quelconque violence, un vulgaire symbole de destruction" dit Boulez).


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Je remettrai peut-être tout ça en forme mardi prochain à mon retour (mais peut-être pas).

 

21 octobre 2005

Cardillac de Hindemith, à l'Opéra Bastille


Première surprise: on identifie du premier coup du Hindemith. Deuxième (demi-)surprise : c'est mauvais. En fait je crois que Hindemith est l'exemple-type du musicien agréable à jouer et assommant à écouter (on peut peut-être sauver les Métamorphoses). J'ai des bons souvenirs de sa musique pour violon seul, qui procure à qui la joue un plaisir digital et intellectuel, mais dont jamais je n'aurais jamais osé infliger l'audition à qui que ce soit ! (incidemment je dois avouer n'avoir jamais rien compris au couplet de Barthes sur la musica practica- surtout qu'il applique son idée à Schumann- qui est quand même un des musiciens les plus passionnants qui soit à écouter)

Donc, une musique néo-classique, sportive et académique, bannissant toute émotion, ce qui n'est pas nécessairement un mal. Des formes closes, bien programmées et qui se voient (ce n'est pasWozzeck); une passacaille, des passages fugués à n'en plus pouvoir, avec sujet contresujet et tout le confort moderne, le tout d'un gris qui provoque le court-circuit (et la roupillette) chez le spectateur....

La seule surprise vient, parfois, de la rythmique (l'un des sujets de fugue a une rythmique qui s'emballe, comme bègue) ou de l'orchestration (des alliages piano-cuivres canailles, un saxophone, des cordes graves, des choeurs impressionnants), un peu dans l'esprit des assommantesKammermusiken dont l'intégrale était au programme de l'un des orchestres parisiens il y a quelques années. Seul passage qui m'ait vraiment plu, la berceuse finale, avec son orchestre en coulisses, un des rares moments de calme relatif, bien loin toutefois des culbutos magiques qui concluent immanquablement les ballets chez Stravinsky.

Le plus déprimant est de voir l'ampleur des moyens déployés, peu en phase avec l'intérêt de l'oeuvre: une distribution de rêve (Angela Denoke.....), une mise en scène et décors inspirés.....En somme, assez d'accord avec lui.

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Pour la petite histoire: j'étais avec A** dans le hall de la Bastille quand je reconnais de vue... Peter Sellars, tignasse, jogging bleuasse et col arc-en-ciel, bon sourire de gnôme malicieux. A** ne l'a pas reconnu. Après un temps d'arrêt, je lui propose avec un clin d'oeil: "on lui court après ? avant qu'il ne rentre dans la salle ?" Et nous voilà à piquer un sprint ventre à terre en slalomant entre les visons (et les mamis les portant), à la poursuite de Peter Sellars. Ah, je te jure. Enfin, A** a vu la trombine de Sellars de face, c'est l'essentiel.

 

20 octobre 2005

L'or du Rhin (au Châtelet)

- le mib biotique du début: plus impressionnant live qu'en disque. On est pris d'un affreux doute géographique: la Moldau serait-elle un affluent (mineur) du Rhin ?

- sur scène, une flèche/ faille, une lance; des jeux de lumière, et rien d'autre (et c'est bien ainsi).

- Un humour (et oui, et oui, on a trouvé souvent cet Or du Rhin drôle) qui tourne au sarcasme.

- Le tissu des thèmes. Les filles du Rhin -> Freia -> les Nornes (?)

- Freia: ce violon (dégoûtant et bourgeois) qui discourt en solo, en mi mineur (aux antipodes du très loin du mib nourricier du début): pour peu on se croirait chez Mendelssohn (pique gratuite) pire: chez Strauss...

- Le récit de Loge, vrai début du cycle: premier flash-back, la mémoire est enclenchée.....

- le Niebelheim: des oompa-loompas au travail, qui ont très chaud avec leurs combinaisons, mais il n'y a pas qu'eux qui triment: l'orchestre produit du rythme (croche pointée-double- croche) en veux-tu en voilà. Le bruit de métal, plus proche des bruits de la nature chez Gustav que de ceux de la ville chez Edgard.....

- Alberich, véritable vedette de la soirée, mi bibendum, mi diva. Une voix à faire pâlir (verdir) Wotan pour l'énoncé de la malédiction, dans une atmosphère de planète à l'air raréfié. On attend avec impatience le "Schläfst du Hagen mein Sohn ?" du Crépuscule.

- la belle musique de la fin (en réb majeur): en haut, le Walhalla et sa pompe, en bas les filles du Rhin, dépitées et sarcastiques. Décidément dans cet Or du Rhin l'ironie n'est jamais loin. Vivement la suite.

(aussi iciici et ....)

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