lundi 3 novembre 2008
A New York, j'ai vu:
- Une installation mémorable de Long Bin Chen: cet artiste colle des annuaires pages jaunes les uns sur les autres puis les sculpte: têtes de présidents du mont Rushmore, mais aussi bouddhas et autres créatures mi-porcines mi-tutélaires. Il dispose ces figurines-annuaires en cercle, et fait passer au milieu un circuit avec un petit train électrique muni d'une lentille (d'un rétroprojecteur ? d'une caméra?). Ce qui fait que le spectateur, enfin, vous ou moi, un peu estourbi, devenu une véritable créature de pages jaunes, se voit défiler au milieu d'autres créatures tutélaires ou porcines. Génial, non ? (ne me dites pas que vous n'avez rien compris)

- Le pont de Brooklyn un jour de grand beau temps


- .... et des danseuses
cruche avec un arrosoir

- De Mario Merz, deux igloos (dont un ci-dessous vu ici) et une suite de Fibonacci (au MoMa)

- Le soir de Halloween, grosse émotion, plusieurs fausses Sarah Palin (betcha) et une superwomen en train de tirer de l'argent (hum, pas sûr d'être très doué pour les photos volées)


vendredi 31 octobre 2008
Dr Atomic
Au Met. Les lampes (qui ressemblent à des feux d'artifices) remontent lentement alors que débute la représentation. Il est temps d'appuyer sur le bouton pour afficher les surtitres, qui s'affichent sur la rembarde juste devant le siège du spectateur.

Doctor Atomic: enfin un grand sujet d'opéra. Les quelques jours avant l'explosion de la première bombe atomique en test, le 16 juillet 1945 à Los Alamos. Une sorte de bête dans la jungle: tout l'opéra s'organise comme l'attente d'un événement abominable et inconnu. On sent la tension qui monte dans l'équipe de physiciens rassemblée par Oppenheimer, la pression des militaires impatients et soucieux de préserver le secret des tests, la peur de l'accident ou du scénario catastrophe alors que de violents orages s'abattent sur le Nouveau Mexique, le désarroi des scientifiques qui croyaient oeuvrer de façon préventive contre l'Allemagne et ne comprennent pas l'utilisation de la bombe contre le Japon. Sellars, le librettiste, a combiné très intelligemment des textes d'archives, de la poésie que fréquentait Oppenheimer (John Donne, Baudelaire, la Bhagavad Gita) et une berceuse indienne chantée par la nurse de la petite fille d'Oppenheimer.
C'est plutôt de la bonne musique, bizarrement.... On retient après coup plusieurs moments forts: l'irruption de la musique concrète, au début et à la fin (l'explosion de la bombe après la machine infernale du compte à rebours ne déçoit pas, loin de là; la solution trouvée est marquante sans être vulgaire); le magnifique air d'Oppenheimer sur le sonnet de John Donne (une musique archaïque et véhémente, peut-être le grand moment faustien de l'oeuvre); le quintette du deuxième acte (avec la berceuse indienne, en surplomb....). Adams joue aussi magnifiquement des des densités d'orchestration et des vitesses de défilement pour donner vie au discours théâtral. Le discours musical, très transparent au premier acte, s'épaissit et se complexifie au second (et je dois dire que j'ai moins accroché, sauf à la fin....)
mercredi 29 octobre 2008
Les trois titans au Symphonyspace
Au Symphony space, les Trois Titans Autrichiens, annonce le programme (c'est bien de ne pas avoir annoncé les trois cimes ou la troisième école de Vienne, il faut savoir rester modeste).
Au menu:
- Bernhard Lang avec ses Différences/ Répétitions. L'artiste dit s'inspirer des DJ et de l'oeuvre de Martin Arnold (dont le potentiel comique n'est pas à sous-estimer). En musique, le résultat est énergétique mais pauvre; la première oeuvre, orchestrée par le chef de l'ensemble Argento, avec des successions de cellules assez prévisibles, n'est pas très intéressante; la deuxième, avec un plus petit effectif, marche mieux.
- Georg Friedrich Haas: De terrae fine, pour violon seul. Avec des doubles cordes et des quarts de tons ! (non, ça ne simplifie pas les choses). Je sens l'effet du décalage horaire (plus que l'air de nouvelles planètes)
- Beat Furrer: Gaspra. La plus belle pièce de la soirée (manquant parfois de continuité)
dimanche 26 octobre 2008
Aujourd'hui j'étais sur les flancs du Canigou (avec vue sur l'Hudson)

jeudi 23 octobre 2008
Beaucoup de cor, et Goerne
Un très beau programme ce soir à Pleyel:
1) Schumann: Ouverture de la Fiancée de Messine. Une musique sombre, sous pression et plutôt variée, pour du dernier Schumann. Dans l'introduction lente, bizarres arpèges rapides aux altos.... ne débouchant sur rien.
2) Schumann: Konzertstück pour quatre cors. Du Schumann pur jus, à la fois virtuose et introspectif. Dans le 2ième mouvement: la densité de cors baisse (chômage technique pour #3 et #4). On met du temps à comprendre la pulsation, petit jeu très malin. Belle partie centrale frémissante et lyrique. Finale festif.
3) Mahler: Des Knaben Wunderhorn. Grand moment avec Goerne. Je prête attention aux paroles, pour une fois. Deux des poèmes sont de la critique musicale; celui avec les morues qui aiment le sermon, mais veulent rester morues; celui avec l'âne qui préfère les tierces du coucou au chant sophistiqué du rossignol. Le poème sur la vie terrestre est bouleversant et me touche plus que Urlicht, qui suit, avec son choral de cuivres (forcément rougeâtres) et sa forme bizarre (c'est ça le problème avec l'éternité).
vendredi 3 octobre 2008
Une Turangalila à Pleyel
- c'est un peu comme retrouver une vieille maîtresse - j'étais vraiment très amoureux de cette musique quand je l'ai découverte, il ya longtemps; maintenant à vrai dire, elle me casse un peu la tête, la vieille maîtresse.
- le joueur de cloche, obligé de réparer son radiateur (les cloches ça ressemble à un radiateur), détraqué après Développement de l'amour (pas compris le problème, la cloche de la était fêlée, panique à bord)
- la fin du n°5 et du n°10: penser à apporter un casque de chantier, la prochaine fois. Près de moi, un monsieur parle très fort alors que la musique vient de s'interrompre, il est peut-être sourd après avoir souvent entendu la Turangalila.
- un manque évident de mouvements lents..... le n°6, suave et pépiant, est un peu longuet (c'est long, l'éternité). Aimé la Turangalila III (une musique joueuse, complexe et énigmatique).
- La découverte du jour: la ritournelle de la Joie du Sang des Etoiles (tellement annonciatrice de la musique liturgique post-Vatican 2) ressemble fort au thème dit de la statue (à tierces zigzaguantes aux cuivres)
mardi 30 septembre 2008
Il était un père, de Ozu

Un veuf et son fils. Le père quitte l'enseignement après le décès accidentel d'un élève sous sa responsabilité; après ce drame, son fils est placé à l'internat; le père et le fils ne se revoient plus alors qu'épisodiquement. Un portrait magnifique de relation père-fils, entre intimité et contrainte. Le torrent dans lequel pêchent père et fils, imprimant le même mouvement, parfois interrompu, à lacanne à pêche. La dureté des adieux, sans cesse renouvelés. L'intimité du bain. Le sourire du père. Pour mon premier Ozu, je crois que c'est un bon début.
samedi 27 septembre 2008
Messiaen Saint Saëns à Pleyel
Un concert kitsch (Messiaen- Saint Saëns) que j'ai écouté un peu sonné (l'effet des trois antibiotiques que je me coltine en ce moment)
Messiaen: Hymne. Me suis endormi pendant la monodie des violons- sirupeux et douceâtre comme un excipient.
Messiaen: Concert à quatre: une oeuvre concertante avec flûte, hautbois, violoncelle et piano.Entrée: le plus beau des 4 mouvements, qui m'a rappelé le tableau de l'Ange voyageur. Un dyptique parfait (chacune des parties - succession de séquences improbables - finissant sur un coup de timbale incisif). Vocalise: un genre mouvement lent sublime de concerto de Mozart, assaisonné de ce que j'ai cru être des sonneries de portable (mais non, c'était juste un marimba pour épicer). Cadenza: mouvement à chants d'oiseau (dont l'un, sauvage, bizarrement au violoncelle). Rondeau: sur un thème qui sonne comme une musette à 6/8, mi 18ième siècle, mi Messiaen; la musique s'en éloigne beaucoup, jusqu'à une superposition virtuose et jubilatoire de trois solistes, jouant des musiques incompatibles.
Saint-Saëns:Troisième Symphonie, en ut mineur: Encore une resucée de LA Cinquième, mais ce n'est plus la lutte entre la Lumière et les Ténèbres, c'est la lutte de diablotins et de nonnettes en costume néo-Moyen Age, modèle production années 50 du Faust de Gounod: personne n'y croit, mais il faut faire semblant de trouver ça irrésistible. Le premier mouvement, mi-Franck mi-Mendelssohn, et le scherzo, avec ses violons fauves sur le sol et ses coups de timbale, ne sont pas mal, mais le mouvement lent et le finale ! Le début du finale ! Le triomphe de l'orgue et l'apothéose des nonnettes suscitent bien un début de fou rire (ces violons qui font les cabots avec leurs accords sur 4 cordes) mais surtout étrangement un alourdissement de la bajoue, de la ventrière, du lorgnon dans son gousset: étonnant pouvoir de la musique. Il ne manquerait plus qu'on joue ça à l'orchestre pédé (mais heureusement c'est trop difficile pour nous).
dimanche 21 septembre 2008
Perthus de Jean-Marie Besset
Au Rond Point.
Deux garçons de 17 ans et leurs deux mères, dans les années 70.

Perthus: le lieu de la frontière, celle entre l'enfance et l'âge adulte, l'endroit où l'amitié devient l'amour, une frontière qu'est prêt à passer l'un des garçons, pas l'autre. Au fond, c'est -encore ! - une adaptation de la princesse de Clèves, mais les nombreuses références qui parcourent le film fonctionnent, elles - et se font écho, comme dans un concert. Scènes de la vie de province: c'est une comédie, avec deux gros insectes possessifs et un peu (un peu seulement) masculins. L'une des mères (celle jouée par Jean-Paul Muel) est un personnage touchant et tragique, qui se rebelle finalement quand son fils est en danger. L'autre mère (Alain Marcel), pétrie d'ambition pour le fruit de ses entrailles et tremblant de peur que son chef d'oeuvre éducatif ne doive aller au rebut pour malfaçon, est un personnage plus directement comique.
Après quelques demi-déceptions (ses dernières pièces étaient un peu trop sociologisantes à mon goût), je retrouve avec enthousiasme et à l'état brut ce que j'aime avant tout chez Besset (que j'aime décidément beaucoup)- ce mélange troublant et précieux d'humour caustique et de roseaux sauvages. Et j'attends de pied ferme la fille du RER.

lundi 15 septembre 2008
Un peu de peinture russe (3/3)
Avant que je n'oublie tous ces peintres, une petite sélection portative des sections XIXème siècle de la Galerie Tretiakov (à Moscou) et du Musée Russe (à Saint Petersbourg). Un continent inconnu qui réserve de jolies surprises.
Alexei Savrasov: le Retour des corbeaux (1871)

Ivan Kramskoi: Léon Tolstoi (1873)

Arkhip Kouindji: la lune sur le Dniepr (1880)

Vassili Sourikov: Le matin de l'exécution des Streltsy (1881) (l'histoire de la Khovantchina)

Ivan Chichkine: Un matin dans une forêt de pins (1886)

Ilya Repine (celui du magnifique dernier portrait de Moussorgski): la réponse des Cosaques Zaporogues au Sultan de Constantinople (1880-1881) (oui oui, on parle bien de ceci)

Du même, Ivan le Terrible étreignant le cadavre de son fils (1885)

De Valentin Serov, un des plus doués de tous ces peintres, un portrait de Konstantin Balmont (1905)

... et de la princesse Orlova (1911)
