vendredi 20 octobre 2017

Kurtag/ Sciarrino

C'est Kurtag qui gagne, facilement, avec. ....quasi una fantasia.... opus 27 n°1, ce chef d'oeuvre qui convoque Beethoven, Bach et Schumann, mais on y entend aussi Bartok et Ligeti. L'Aria finale est sublime. Les musiciens sont dispersés autour de la salle. Dans les Messages de feu mademoiselle Troussova, remarquable adéquation des idées musicales (souvent très simples) avec un texte court et percutant. Pour ne prendre qu'un exemple, dans le n°14, des chaînes de noires qui s'interrompent figurent les trous de mémoire du texte (Tes disparitions/ C'est comme de noirs trous de mémoire. Des non-liens dans l'action/ Mais de lien, il y en a un autre, qu'on appelle le temps).  Partie érotique (n°3 à 7) particulièrement violente (vocalises dans Fièvre, le n°3; sarcasme a cappella dans le n°5 (Pourquoi ne pousserais-je pas des cris de cochon/ Quand autour, tout le monde grogne) suivi de la musique de bastringue du n°6. De Sciarrino (Gesualdo senza parole, Il sogno di Stradella, Omaggio a Burri), c'est la dernière pièce (flûte, clarinette et violon) que je retiendrai, avec ses bruits de clapets et une musique qui tarde à naître.

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jeudi 19 novembre 2009

Des hongrois à la Cité

Du moins au plus intéressant (et aussi dans l'ordre du concert):

  • Séquences du vent, de Peter Eötvös: du vent, effectivement.
  • Quatre caprices de György Kurtag (sur des textes un poil salaces d'Istvan Balint): trop long et pas assez épuré pour être du meilleur Kurtag.  
  • Torso de Marton Illes: une musique à fin blamblam (on s'extasie sur la capacité de Susanna Mälkki à battre rapidement des mesures vides) et une partition stimulante dont on comprend assez vite intuitivement les grands principes (agrégation/désagrégation, défilement de personnages rythmiques comme dans le Sacre, jeux de timbres)
  • et le Concerto pour violon de Ligeti, dont on avait oublié à quel point c'était une musique sublime. Praeludium féérique, à tissu moiré des cordes; Aria, hoquet et Choral à ocarinas; Intermezzo à escaliers d'Escher; Passacaille lugubre; puis un Finale avec un concours de sauvagerie pour les pizz entre violoncelles et contrebasses, et une vraie et magnifique cadence pour le violon solo. Heure de gloire méritée pour Diego Tosi, qui file faire la bise à ses deux collègues de l'EIC.

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jeudi 3 avril 2008

Ives, Messiaen, Kurtag, Benjamin et Fujikura à la Cité


Hier soir, encore un concert où je suis allé après avoir assuré comme une bête en ne laissant pas une question sans réponse (oui! comme une bête !).

Ives: La question sans réponse. Très grand moment de musique. Sur un tapis moelleux de quatuor à cordes, la phrase incongrue d'une trompette solo puis le commentaire des bois, qui modifie imperceptiblement la façon dont on écoute la question posée par la trompette. Incroyablement simple et efficace. Beaux éclairages. Direction discrète (il ne faut pas casser la magie) de Susanna Mälkki qui fait signe à la trompette et les bois, satellisés dans les balcons, pour leurs interventions.

Kurtag: Scènes de roman, pour soprano, violon, cymbalum et contrebasse (deux instruments sourds, feutrés et deux dessus virtuoses). L'amour et la vie d'une femme, un roman russe (et pas hongrois malgré le cymbalum). Parfois magnifique, parfois décevant. Je veux retenir le n°3, une prière avec glissandi symétriques du violon et de la basse; le perpetuum mobile du n°12 (la série infinie des dimanches) avec ses arpèges d'une violoniste du dimanche qui s'exerce ad nauseam; le n°14, peut-être mon préféré ("Et chez toi dans ton jardin/ pousse/ l'herbe/ de l'oubli" avec une mise en musique saisissante: tictac implacable du cymbalum, arpèges du violon, pizz Bartok de la contrebasse); enfin, le n°15, beau comme la passacaille de Didon avec des trémolos sur chaque note chromatique descendante.

Benjamin: Trois inventions pour orchestre de chambre. Je trouve la première pièce (dédiée à Messiaen) lumineuse et sublime; la deuxième déjà moins et je disjoncte pendant la troisième. C'est un problème récurrent chez Benjamin - peut-être sa musique est-elle trop complexe ? Réveil brutal avec les gongs tout à la fin.

Fujikura: ...as I am.... La création du jour. S'entend avec plaisir. Texte un peu raccoleur (la logorrhée d'une amoureuse délaissée), mais non dépourvu d'humour et de légèreté, ce qui ne gâche jamais rien. Calm sea no boat sans Felix (on n'est pas chez Edward). Musique bien articulée en plusieurs sections clairement repérables; la chanteuse profite des transitions pour se déplacer et faire travailler ses jolies bottines. A propos de cabotinage, moment "amusant" de "mal chanté" d'autant plus "pénible" que la chanteuse est sonorisée.... (je laisse les guillemets pour donner au lecteur la liberté de décider si j'écris au premier ou au second degré).

Messiaen: Sept Haikai. Haikai, haikai, tu parles Charles, c'est bavard comme du Messiaen, oui ! Du Messiaen des années 60, aimable comme une table en formica (mais on s'en fout que ce soit une musique malaimable, hein). Comme chez Ives (ou Ignace), la rhétorique alimente la mystique. Et Dieu doit se cacher quelque part entre l'ouverture du panneau mobile (l'Introduction) et sa fermeture (la Coda). Un moment de pure beauté dans le Gagaku central (je n'arrive même pas à détester la sonorité aigre des violons). Les mouvements intermédiaires, qui vont par paires, sont plus arides, avec force chants d'oiseaux et percussions métalliques, et l'intervention de Pierre Laurent Aimard, qui joue tout cela avec un naturel confondant (des années de pratique religieuse, sans doute).

Aussi: ici.

 

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vendredi 1 septembre 2006

Prom 63

 

Vu le Prom 63 (écoutable ici) dans un Royal Albert Hall vide aux trois quarts. Une musique parfaitement dépressive. Les espèces de cachets roses géants suspendus au plafond du Royal Albert Hall m'ont tout de suite évoqué des neuroleptiques.... leur fonction acoustique m'a en revanche échappé. Un progamme pour choeur : les Songs of Despair and Sorrow de Kurtag (engendrant efficacement les sentiments décrits dans le titre), les doubles choeurs op 141 de Schumann (du RSch proche de l'asile) puis Rothko Chapel de Feldman.

Des trois oeuvres, c'est le Kurtag qui était de loin le plus intéressant. 6 pièces à effectif variable (sur scène, en plus du choeur, un quintette de cuivres, un sextuor à cordes, quatre bayans- des accordéons chromatiques russes, plus des percussions diverses et variées), mais personne ne joue en même temps. Je retiens le n°2 d'après Aleksandr Blok (très lent, avec des nappes de sons au choeur accompagné par les cuivres, avec le mot noch -la nuit- qui ressort), le n°5 - Crucifixion(Akhmatova), contrapunctique, passionné et très chargé quand il s'agit de Madeleine, puis brutalement hiératique quand il est question de Marie; et enfin et surtout le n°6, Pora (It's time) (Tsvetayeva), à base de percussions (cloches, cymbales, toms dans une ronde à trois temps), un adieu au monde finissant dans des chuchotements, du très grand Kurtag. Cette oeuvre sera redonnée à Paris dans le cadre du Festival d'automne (n'est-ce pas Pascal).

Rien à dire du Schumann (qui fait s'effondrer une théorie que j'aime à soutenir, à savoir qu'il y a des choses passionnantes même dans le dernier Schumann). Quant au Feldman.....ma théorie sur la question (puisque Rothko Chapel est souvent joué) c'est que c'est une musique qu'aiment des gens qui n'aiment pas la musique. Qui s'intéressent à la chapelle commandée par les DeMenil à Houston, par exemple. Mais j'ai trouvé qu'il y avait pour le moins un hiatus entre ce qu'annonçait le programme (une musique "expressive, subjective") et ce que j'ai entendu, une musique très pauvre - des percussions hiératiques, un choeur bouche fermée et un alto qui joue inlassablement les mêmes figures de septième. Le pompon étant cet air élégiaque vers la fin, dont Feldman dit que c'est le souvenir d'une pièce écrite quand il avait 14 ans..... Effectivement.

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Demain, on peut écouter le prom 65 en direct en attendant un éventuel compte-rendu ici.

 

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mercredi 26 juillet 2006

Les Esteves à l'hôtel de Soubise


Ce soir, beau concert du quatuor Esteves. Un programme plein de substance avec trois gros morceaux: l'opus 77 n°1 de Haydn, les 6 moments musicaux de Kurtag et le 4ième quatuor de Bartok.

l'opus 77 n°1 en sol: Après le 1er mouvement, d'une belle ampleur avec son thème de marche, le grand moment c'est le sublime mouvement lent, une forme sonate monothématique, en mib majeur, avec ses unissons et son thème harmonisé, ses oppositions entre confidences dans l'aigü et cordes graves. Je craque quand le violoncelle prend le thème en main, au debut du pont et à la fin de l'exposition. Scherzo rythmique, avec le violon virtuose dans l'aigu, et un trio en mib pris très vite. Finale foldingue avec une fin jouissive, comme souvent chez Haydn.

le Kurtag: une sorte de suite lyrique en 6 mouvements, les numéros pairs étant rapides et fantasques, les numéros impairs étant lents et funèbres. Dans 1 et 3 (la partie centrale de 3, plus exactement), Kurtag tisse des hoquets, mais ça sonne très différemment des hoquets du jpète-Ligeti, plus lumineux. Successivement:

  • Invocatio (un fragment)
  • Footfalls, un poème d'attente
  • Capriccio humoristique (très swing)
  • In memoriam György Sebök,une musique très forte et véhémente, (avec un do-sol-mi au violoncelle, étrange et repris par tous à la fin)
  • ... rappel des oiseaux... (étude pour les harmoniques), dédié à l’altiste Tabea Zimmermann, une étude de sons flûtés (avec les staccatos du violoncelle qui contrastent)
  • Les Adieux (in Janaceks Manier), adaptation d’un morceau extrait des Jatetok (Jeux) (avec des bariolages et des pizz)

Comme d'habitude j'ai bien aimé les pièces ludiques (3 et 5), mais l'hommage à Sebök m'a semblé aussi très fort. Il faudra un jour que j'écrive ce que j'aime chez Kurtag (la culture musicale et poétique qui nourrit son oeuvre, sans l'étouffer)

le Bartok. Le mouvement lent, si beau, m'a un chouïa déçu, mais les deux scherzos étaient très bien, et le finale ! quelle gifle ! ça fait du bien.

Et en bis: un mouvement lent de Mozart (KV575) démontre définitivement la supériorité de Haydn....

Add: 2 mouvements du Haydn dans la radio idoine

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