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zvezdoliki
13 février 2006

Götterdämmerung, au Châtelet

  • Vivent les opéras le dimanche après-midi, j'étais frais comme un gardon et je n'ai pas perdu une miette de ces 6h30 de Crépuscule des Dieux, le meilleur de la Tétralogie, un vrai torrent de musique (même si nous étions hypermalplacés : très en haut tout à gauche, avec une vue plongeante sur l'orchestre : quel spectacle....)
  • Avec le Prologue et le 1er acte, on est d'emblée dans une telle splendeur musicale, dans une telle forêt de leitmotive - parfois trois ou quatre à la fois, avec des variations d'humeurs très rapides - qu'elle décourage le compte-rendu. Visuellement, choc plastique avec les Nornes (aux mains en formes de ramure et liées par un voile commun) et très beau début du 1er acte à la cour des Gibichungen (Hagen, lance rouge, mains rouges). La première apparition sonore de Siegfried à la cour des Burgondes: du thème de cor dérive une série de groupes de deux quintes descendantes qui s'enchaînent et se développent.
  • Si Siegfried est un opéra à interrogatoires, le Crépuscule est un opéra à serments (d'ivrognes) et unissons dissonants: un Siegfried (sous influence)/ Günther, un Siegfried/ Brünnhilde qui tourne au vinaigre (avec triolets modèle symphonie Italienne pour faire gagner Brünnhilde), un triple et vénéneux Brünnhilde/ Hagen / Günther (où un seul sur trois - le méchant- est lucide).
  • Au deuxième acte, mon moment préféré est la scène Alberich Hagen (un Kurt Rydl splendide bien que patraque)- la rencontre au sommet de deux animaux antédiluviens pour reprendre le mot de Wagner. Hagen, un roc de haine, immobile, comme sous hypnose....(Sei treu...) Instabilité de la rythmique des cordes, qui chaloupent en syncopes, avec en arrière plan les cuivres dans le grave. Plus tard dans l'acte, le choeur d'hommes, splendide, avec Hagen qui tire les ficelles. J'ai encore dans l'oreille ce do bécarre, trémolo, sauvage, insistant, des cordes, qui frotte sans concession avec un réb dissonant: la mort.
  • Le troisième acte démarre sous le signe du gibier d'eau, avec les filles du Rhin en oiseaux de malheur. C'est une scène curieuse, qui était très gracieuse chez Wilson hier : légère et fantasque, elle contraste avec ce qui va suivre, l'artillerie lourde de la tragédie. J'étais heureux aussi de redécouvrir la scène suivante : le récit de Siegfried, qui ne retrouve le souvenir de ce que chantait l'Oiseau qu'à l'aide du contre-philtre de Hagen- et retrouve ainsi le fil perdu du troisième acte de la Journée précédente, Siegfried. (Shorter du Crépuscule des Dieux: c'est le drame d'un héros qui perd la mémoire et ne reconnaît plus ce que chante l'Oiseau). Je me souvenais bien de la dernière demi-heure (le sommet final des adieux de Brünnhilde); en revanche, j'ai dû vérifier que le cycle finissait en réb (et pas en mib comme le prélude de l'or du Rhin : pourquoi pourquoi pourquoi ?).

Vivement le prochain Ring (dans 11 ans ?) : je me fixe comme objectif d'être alors un aussi bon interprète des intentions de Wagner que Siegfried avec l'Oiseau....(comment comment comment ?avaler un philtre ? des pages de leitmotive ? des graines ? )

 

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13 février 2006

Une soirée à M***

Samedi, à l'heure du thé, au centre culturel de M***, vu Brokeback Mountain, avec le chat et .... (roulements de tambours....) sa mère.

J'ai eu un début de panique et flairé le traquenard quand j'ai entendu le chat, mi-évasif mi-roublard, dire à sa mère: "tu vas voir, c'est un western qui a été primé à droite à gauche....", puis quand je me suis rendu compte que sa mère n'avait aucune idée de ce qu'était le film et qu'elle avait aveuglément suivi les conseils de son ingénieux fiston.... Finalement, pas de drame, elle est sortie de là en observant judicieusement que ces jeunes gens avaient bien du mal, même tout nus, à se séparer de leur chapeau et nous avons eu une discussion sortant des sentiers battus sur la conduite des troupeaux de moutons en montagne (qui offre matière à de riches polémiques).

Ayant passé victorieusement la première épreuve et répondant à une invitation déjà ancienne, nous sommes allés dîner dans la maison familiale où nous avons retrouvé le père du chat. Comme je l'ai déjà écrit, j'étais déjà allé plusieurs fois dans la maison familiale, mais c'était en l'absence des parents, avec plusieurs des frères du chat ; par ailleurs, j'avais déjà rencontré, mais chez lui, sa mère. Mais là, c'était une invitation en bonne et due forme, avec nous deux et eux deux seuls, et ils avaient manifestement mis les petits plats dans les grands : symboliquement c'était un signal fort que j'ai pris comme tel. Je crois que le courant est bien passé, avec du respect des deux côtés et même un peu plus; si le père est amorti mais souriant, la mère du chat a un peps étonnant et une grande curiosité intellectuelle. Après un interrogatoire en règle sur les sujets chauds du moment (Outreau et caricatures), la conversation s'est orientée sur le chat et a apporté son lot de révélations fracassantes : pour résumer, c'était un bébé calme, rigolard et pétocheux et ça n'a pas beaucoup changé.

Je ne crois pas que ce dîner est annonciateur de relations beaucoup plus suivies ; ce sont des personnes très âgées (>80 ans), j'ai déjà fort à faire avec mes propres ascendants et je ne cours pas après les réunions familiales. De toutes façons l'obstacle à une véritable intégration vient plutôt de la fratrie - et plus spécifiquement, des trois (sur sept) que je ne connais pas et qui résistent sérieusement : je me souviens encore de ce frère du chat qui nous avait demandé de dégager de la maison de V*** parce qu'il allait débarquer, lui, avec ses enfants..... (tout ça, évidemment, et je m'en étrangle d'indignation, au motif que le contact entre un couple homo et des enfants seraitdangereux éducativement)

Mais je dois saluer cet accueil des parents du chat samedi, plein de gentillesse et d'attention pour moi, un état d'esprit dont mes propres parents sont encore loin vis-à-vis du chat (qui ne rentre pas du tout dans leur radar...). Je pense qu'une des différences d'attitude entre ses parents et les miens provient du fait que, dans ma famille, les liens sont plus resserrés, et deviennent tout de suite plus passionnels, alors que dans celle du chat - et ce n'est pas une loi générale des familles nombreuses - les liens sont finalement assez distendus et les relations plus dépassionnées...

9 février 2006

Siegfried, au Châtelet

Hier au Châtelet (avec A***).

  • Une remarque d'ensemble: on peut penser ce qu'on veut de la mise en scène, mais je la trouve souvent très en phase avec une musique qu'elle sert bien.
  • Adoré le 1er acte. La musique y est tonique, brillante, gaie et souvent drôle, comme dans cettescène où Mime essaie de flanquer la frousse à Siegfried en se faisant passer pour Hulk. Et souvent intelligente, aussi : frappé par l'irruption, à la fin du prélude, du thème de l'épée, un do majeur qui jure avec une tenue de sib (on est en fa mineur) : il est difficile de trouver une illustration plus convaincante de l'impossible soudure.....
  • J'ai un faible pour la 2ième scène, celle où les deux pères (le fourbe envieux et le potentat masqué) se balancent à la figure, avec un succès inégal, des questionnaires oedipiens. Une scène où s'opposent deux musiques: l'une, modulante et hiératique, de Wotan, et celle agitée et grotesque, de Mime (Boulez dit qu'il dirige Wotan à 2 et Mime à 4). Cette opposition était très bien rendue par une mise en scène qui traite Mime comme une marionnette se mettant en branle à chaque question. Le Voyageur (Wanderer) = Le roi des métamorphoses (Verwandlung), des modulations (ce sublime thème d'accords chromatiques qui tournoient, comme au moment de vertige d'une passacaille) ?
  • Grosse fatigue au 2ième acte. Mais ont émergé, comme dans un rêve : les Murmures de la Forêt (peut-être ce qu'il y a de plus beau dans Siegfried, cette musique toute simple qui chante la nature.....) ; la scène où Mime essaie de prendre le heaume à Siegfried (qui évoque irrésistiblement la scène de Klaus Narr dans la IIIème partie des Gurrelieder) ; et puis, ces tubas-dragon qui rampent dans le grave....
  • Au 3ième acte, le prélude (avant la belle scène Erda-Wotan) est un fantastique emboîtement de leitmotive : on entend de la Walkyrie encastrée dans de la colère des Dieux (tout comme on avait entendu le Wanderer walkyrisé à l'acte II): c'est une colère solide comme une coque de bateau. Un autre grand moment: quand Siegfried rentre dans le cercle magique et s'approche de Brünnhilde, Wilson ferme puis réouvre la scène par un mouvement latéral du rideau de scène, qui coïncide avec la belle ligne des violons, seuls, qui monte, puis, touchée en vol par un bout de leitmotiv (le Tarnhelm ?), redescend (avant un troisième aller-et-retour, celui des deux clarinettes). Un peu hébété après 5 heures de spectacle, je reste toujours aussi insensible à la musique de la lente décongélation de la Walkyrie (lente pour des questions de cuisine sans doute), pas du tout pimentée par une mise en scène plus-que-lente.
  • Rien à faire, je trouve toujours détestable cette représentation enthousiaste du meurtre des pères et de l'arrogance de la jeunesse ; je n'arrive pas à me s'abstraire de l'idée que Siegfrieda dû être du pain bénit pour les nazis....Mime, d'accord, l'a peut-être bien cherché mais Wotan aussi est très en position de faiblesse dans cette scène obscure du 3ième acte....
  • Add: je mets dans la radio un assortiment Siegfried - en fait des morceaux commentés plus haut, le Prélude le l'acte I (avec l'épée à 3'35"), le début de la scène du Voyageur avec Mime; à l'acte II, un bout de la scène des Murmures de la forêt, un bout de la scène finale Mime/ Siegfried; à l'acte III, le prélude puis l'introduction de la scène du réveil de Brünnhilde (avec la ligne sinueuse des violons). Et quelques échos: la scène de Klaus-Narr dans les Gurrelieder et la scène des trois coups de l'ange qui cherche à rentrer dans le monastère, au tableau 4 de Saint-François d'Assise de Messiaen.

 

6 février 2006

Un Requiem de Mozart à la Madeleine

Vu comme Pascal le concert de l'Académie de Musique de JP Sarcos, jeudi soir. Pour un orchestre semi-professionnel (d'après ce que j'ai compris le résultat d'une scission du COGE, avec un encadrement de haut niveau), c'était d'une très bonne qualité; et le choeur, parfois un peu bas, avait de très belles couleurs et une vraie pêche.

Et (bouffée de jalousie) c'était plein ! En partie grâce au programme (bateau à souhait: Ecossaise de Mendelssohn + Requiem de Mozart). Mais aussi (et c'est à méditer pour nous qui cherchons de façon hystérique à attirer le chaland) grâce à un réel effort de réflexion pour mieux organiser et présenter le concert, conçu comme un véritable office funèbre. Avec des partis-pris forts: intervention du glas au début et à la fin, recentrage sur les parties originales écrites par Mozart (en remplaçant les parties de Süssmayr par du grégorien), arrêt du Lacrymosa au moment où Mozart aurait arrêté la composition, intervention cataclysmique du grand Cavaillé-Coll dans le Rex, coupure entre les morceaux avec des improvisations à l'orgue, lecture d'une lettre de Mozart. Résultat: le spectateur écoute avec plus d'attention, persuadé qu'il assiste à un événement exceptionnel. Et moi qui étais sorti exsangue de l'année 1991 en jurant qu'on ne m'y reprendrait plus, j'ai écouté avec plaisir ce Requiem (qui n'est pas et de loin mon Mozart favori).

En revanche j'ai copieusement somnolé dans le Mendelssohn, que j'aime pourtant énormément - précisons - à la fois pour l'introduction du 1er mouvement, pour ce beau mi mineur qui est la marque de fabrique du compositeur, pour le bijou rythmique du scherzo (une forme sonate miniature), pour l'énergie du thème du finale avec ses snapshots. Mais l'acoustique n'était vraiment pas adaptée à l'exécution d'une symphonie. En dépit de cela j'ai été très content de voir un concert à la Madeleine, en rêvant sous ces lampadaires à acétylène qui auraient pu être ceux d'une gare, à ce que Contant d'Ivry aurait fait de l'église, aux transformations voulues par Napoléon, aux funérailles de Chopin (le30 octobre 1849) et à celles de Marlène Dietrich en 1992....

1 février 2006

Messiaen Machaut (et non pas méchant macho) à la Cité de la Musique

Beau programme pour inaugurer le cycle Extase et transe. Avec les Visions de l'Amen, on était tout de suite au coeur du sujet. Ce cycle est plus court et plus concentré (comme du chocolat à 90% de cacao) que les 24 Vingt Regards sur l'enfant Jésus qui datent de la même époque. Le premier Amen (Amen de la Création) prend tout de suite aux tripes: un grand choral cosmique, avec crescendo, avec le thème de la Création aux basses. Note pour moi: réécouter le n°2 (Amen des étoiles, de la planète à l'anneau : une danse sauvage et brutale, ludique au possible) et le n°6 (Amen du jugementTrois notes glacées comme la cloche de l'évidence. "Maudits, retirez-vous de moi" écrit Messiaen). La dernière pièce (Amen de la consommation) est la glorification du thème de la Création, dans une débauche de cloches et de fusées. Tout cela est du Messiaen de 1943, avec beaucoup de saccharine et de couleurs modales. Très impressionnant à voir (d'où j'étais): Madame Jude - la voix du bas - arpégeant des accords sur 4 octaves! Respect (pendant que Monsieur Beroff - la voix du haut - pépie et sort la verroterie).

Arpèges

En bis: changement complet d'ambiance avec la transcription du Prélude à l'Après-midi d'un faune.

Deuxième partie: Messe de Machaut avec quelques motets intercalés, chantés par le Hilliard Ensemble. Le Gloria et le Credo sont homophoniques, le reste est d'une complexité rythmique redoutable (tiens: le Ite Missa est est chanté). A la limite du fou rire avec C*** (qui s'est trissé discrètement entre deux motets, le bougre), notamment dans l'Amen conclusif du Gloria (et ses hoquets en folie). J'ai eu du mal avec les deux contreténors: celui de gauche ressemble à Rosswell et a vraiment une voix d'extraterrestre, l'autre a un air de comptable de la City; très agité du bocal, il est doté d'une voix étrangement nasale. Persiflage mis à part, l'ensemble des cinq voix sonne très juste, c'est vocalement très beau tout en préservant l'individualité des voix.

Ah j'oubliais le plus important: croisé Gaël Morel au métro Blanche à 23h20. C'est un signe, mais de quoi ?

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