Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
zvezdoliki
12 août 2010

Tout le monde en a déjà parlé, mais je plussoie:

Parfois la lecture des blogs réserve des cadeaux incroyables comme celui-ci .... ou comme celui-là. Chapeau bas. 

(je crois avoir du chemin à parcourir, côté décapage des mauvaises couches.... et je n'arrive pas à lire sans amertume "« C'est dommage que ton père n'ait pas connu [le copain]. Il l'aurait beaucoup aimé. »)

 

Publicité
23 août 2010

dans le bus, l'autre jour...

... deux gamins (l'âge délicat de Chérubin et de de la quatrième 3) se collent des beignes avec un enthousiasme évident, enfin, plutôt, se tripotent tout ce qu'il est possible de tripoter dans un bus. L'un des deux, le plus petit mais aussi le plus coriace, traite l'autre, avec une tendresse manifeste et une obstination louable, peut-être une bonne centaine de fois en une heure de trajet, d'enculé. Comment on dit, déjà? c'est celui qui dit qui l'est?

30 octobre 2011

Chailly Leipzig Beethoven

Samedi soir à Pleyel. Une oeuvre de Colin Matthews (Grand Barcarolle) qui m'a paru bien fade et deux symphonies de Beethoven (la 8 et la 6). Orchestre virtuose, manifestement très pressé (les cars devraient être en double stationnement rue du Faubourg Saint-Honoré). Cordes pléthoriques (16 V1, 14 V2 si j'ai réussi à bien compter): magnifique pâte sonore dans le mouvement lent de l'Eroica, c'est parfois moins convaincant dans les mouvements rapides, pour lesquelles l'articulation est un peu gommée. La 8ième a été un plaisir sans mélange, notamment tout le finale (tempo infernal) et le trio du scherzo (avec le chant d'opéra de la clarinette sur les ressorts des violoncelles).

13 décembre 2011

Leonhardt aux Bouffes du Nord

Le dernier concert du maître. Beau programme, très varié. En première partie, Bach (la suite für das Lautenwerk BWV 996) et ses sources; en seconde partie, des français, d'Anglebert et l'anachronique Duphly. Beaucoup de belles découvertes pour moi: je retiens les petites fugues de Pachelbel, joyeuses et serrées; la chaconne de Böhm, archaïque et d'une belle ampleur; les deux grounds de Purcell qu'a choisis Leonhardt, l'un à la période plus longue et riche que l'autre; la sublime sarabande de la suite BWV996; les pièces en forme de portrait de Duphly (une musique fraîche et française jusqu'au bout des mitaines). Pour prendre congé, retour à Bach avec un extrait des Goldberg, la variation lente et chromatique

14 janvier 2012

Vus:

- Hugo Cabret: magnifique (une gare parisienne avec tour à l'horloge, Baron Cohen en Longtarin à patte folle et Ben Kingsley en prince déchu: la 3D comme machinerie du merveilleux)

-Let My People Go: gay, finlandais et pascal (Bideau en créature libidineuse, Maura avec le spray "devenir juif" et ....Nicolas Maury)

- Une autre vie: drame des normes dans le BTP (et du crédit revolving; apparemment, le scénario n'est pas crédible sur ce point crucial)

- J Edgar: relative déception  (j'avais trop salivé)

Publicité
7 février 2012

La dame de pique, à l'Opéra Bastille

Pas mieux

Le mystère des три карты enfin dévoilé: c'est тройка, семëрка и туз (mais que ça reste entre nous, hein)

Musique à la fois claire (l'orchestre est rarement monstrueux, les effets sont très perceptibles) et chaotique, avec bizarreries: des syncopes brésiliennes; l'irruption d'une une trompette flamboyante dans une messe des morts; des bariolages furieux (la Neva, sans doute) et des contretemps de folie (un pastiche du Baiser de la Fée, sans aucun doute). Pour la bonne bouche, ce morceau de bravoure d'un oy-oy-oy très pur et ce passage tchaïkovskissime (violons divisés, altos en tête chercheuse et ploums obsessifs; on se dit que ça ne va pas très bien dans la tête de ce pauvre H.).  

10 février 2012

Vu

* L'amour dure trois ans (Beigbeder, plutôt une bonne surprise, en fait)

* Mission Impossible 4: un vrai chef d'oeuvre (avec en prime l'humour qui faisait défaut aux précédents)

* Tahrir (à la Eisenstein, pour la fille au smiley)

* Les chants de Mandrin (trouvé ça très peu convaincant. Chez RAZ, RAS: le dragon se fait buter comme dans un jeu vidéo. Et puis quelle horrible bande-son) 

* Noces. Un documentaire sur le travail de Mirella Giardelli à partir de Noces, de Stravinsky. Ce sont ici les noces.... de Stravinsky et Ramuz (leur photo est promenée comme une icône dans la représentation....), même si de mon point de vue c'est un couple déséquilibré et le film donne un peu trop la parole à Ramuz). Le film est magnifique dans ce qu'il donne à comprendre de la musique: on regrette juste qu'il ne passe pas plus de temps sur tous ces passionnants exercices de préparation, en petit ou grand effectif (les roulements de grosse caisse, les scènes où tous comptent des choses différentes, la scène lunaire mère-fille). C'est bon aussi d'entendre Noces en français (hélas, le russe semble avoir gagné la partie au disque, à part la version Ansermet, c'est du russe partout), ce qui permet au spectateur francophone de se rendre compte davantage de la dimension bouffonne, villageoise de l'oeuvre. Le parti pris de la représentation de Noces qui clôt le film est de mêler dans une arène close les percussionnistes aux chanteurs, de traiter la partition comme un opéra (un mystère?), pas comme un ballet (comme le voulait Stravinsky, mais pas Diaghilev); ça marche bien notamment parce que les chanteurs (la mariée, le marié, le père, la mère) jouent très bien. La fin de Noces est sidérante (pianos, crotales et cloches) et l'oeuvre me laisse toujours euphorique.

27 septembre 2011

La clémence de Titus à l'Opéra Garnier

Première fois que je vois cet opéra (que je ne connais qu'au disque). En deux actes, l'un qui embrouille tout, jusqu'à un noeud tragique; l'autre qui dénoue les tensions (mais achève l'empereur). C'est réussi car la méchante l'est vraiment (et bien toxique en plus). C'est cette créature ravagée par la passion, davantage que le clément empereur, qui rafle les plus beaux airs, avec son sextoy Mondamoiseau âme damnée de Sesto. La musique est moins riche que celle d'Idoménée, plus apollinienne, dégraissée. Il est de bon ton de taper sur les récitatifs de Süssmayr, mais le moment de la confrontation entre Sesto et Tito est extraordinaire (les deux scrutent sur la même musique le visage de l'autre...). J'ai envie de réécouter:

  • l'air de Sesto au premier acte (en si bémol, célèbre à juste titre, avec cor de basset solo)
  • toute la fin du premier acte, magnifique
  • l'air de Publio au second acte (il veut faire douter Tito, et l'ostinato des cordes reprend la trace du chien des Saisons de Haydn: une nouvelle piste à suivre, truffe à l'air. Incidemment, c'est une des plus petites formes sonate de l'opéra; centrée sur une idée unique -et fructueuse)
  • l'air de Sesto au second acte, peut-être le plus mystérieux de toute l'oeuvre. Sesto veut parler à son ami Tito, mais ne peut rien dire. Impassibilité (la bémol très étale), mais tension (intervalles acrobatiques) et chromatismes à la fin de l'exposition sur "se vedessi questo cor". Fin à étages multiples.
  • l'air de Vitellia au second acte (encore avec le cor de basset, en fa, pendant de l'air de Sesto au premier acte. Virtuose et un peu fou)

Belle production dominée par le couple vocal Vitellia / Sesto (Hibla Gerzmava/ Stéphanie d'Oustrac). Mise en scène intelligente mais parfois négligente et inutilement bouffonne (1/ Vitellia faisant tomber des fleurs en plastique sur du béton: bruit énorme, grotesque au possible, à la Deschiens 2/ Publio se cassant la figure du monument à Titus pour ramasser sa couronne: rires irrépressibles dans un amphithéâtre chauffé à blanc).  

 

29 novembre 2012

Requiem de Dvorak

Un Requiem à griffe: un thème en forme de croix, un BACH simplifié et renversé: deux demi-tons ascendants encadrent un ton descendant; impossible de le louper, le Requiem démarre par ça et on l'entend très souvent dans l'oeuvre (du coup une des chansons des demoiselles de Rochefort m'a trotté en tête toute la soirée, Perrin chante quelque chose qui ressemble beaucoup à ce thème). Curieux attelage: texte latin d'une part, musique slavisante d'autre part (beaux choeurs a cappella et prédilection pour le très grave: basse profonde solo, contrebasson dans l'Offertoire). Le texte du Requiem est vraiment impossible ("Placez-moi parmi les brebis, Séparez-moi des béliers, En me mettant à droite"; il faut vraiment avoir une commande duFestival de musique sacrée de Birmingham pour avoir envie de mettre un texte pareil en musique). Bien aimé le Graduale (merveilleux air de soprane, orchestration délicate), le Tuba Mirum (chabraque,avec des ploums à la Verdi), la fin du Lacrymosa (le choeur a cappella), l'Offertoire (pompier comme on aime, qui finit par un quam olim Abrahae, qui je vous le donne en mille, est une fugue..... un des rares moments de vitalité rythmique de l'oeuvre, irrésistible), et l'extrême fin de l'oeuvre. Merci à guillaume à qui je dois cette découverte.

14 décembre 2012

Médée au TCE

Très d'accord avec ceci, inutile de faire long. C'est un peu l'anti Carmen de l'autre jour: 1/ une musique de second ordre; 2/ un rôle-titre tenu par une chanteuse engagée dramatiquement, mais à la diction strictement incompréhensible, dans le parlé et le chanté; 3/ une mise en scène inspirée et forte, parmi les plus simples qu'ait réalisées Warlikowski; 4/ un orchestre sur instruments anciens, incisif et savoureux. De la partition, je me souviendrai (peut-être) des morceaux orchestraux (l'ouverture et l'introduction du 3ième acte), d'un air bizarre à hoquets où revient en boucle un accord dissonnant non résolu, décoratif; d'un air non moins bizarre avec basson solo.  Tout cela est très sérieux, écrit avec savoir-faire et n'arrive pas à décoller, à la différence de la musique de Gluck. Pour la chronique mondaine, j'ai rarement vu une salle aussi survoltée; à Jason disant "- Te satisfais-tu de ce bordel" un spectateur au 2nd balcon a lâché "- Pas nous" (deux répliques très écrites comme on peut le constater). La salle s'est aussi déchaînée pendant ce que j'ai compris ultérieurement être un entracte - de la musique de twist enchaînée directement à celle de Cherubini, effet dramatique réussi (Médée isolée au milieu d'une foule frivole et indifférente) mais manque de confiance un peu trop voyant dans le faible pouvoir évocateur de celle de Cherubini.

24 février 2013

Vu

Dans le genre génial: Lincoln (le chemin tortueux du 13ième amendement. Rétrospectivement, qu'est-ce que les arguments "si on fait passer ceci c'est la porte ouverte à cela" sont ridicules (je dis ça je ne dis rien))

Dans le genre bien: Skyfall - Argo(FuckYourself) - Django Unchained - Wadjda (pour la scène où la gamine gagne le concours de récitation coranique et a l'idée idiote de dire qu'elle veut utiliser l'argent du prix pour acheter un vélo) 

Dans le genre j'en attendais des horreurs et en fait ce n'était pas mal du tout: Alceste à bicyclette - Renoir - L'odyssée de Pi - Happiness Therapy - Lore

Dans le genre gay et tristouille (et pour tout dire un peu décevant): Yossi (sans Jaeger)

Dans le genre vraiment pas bien du tout: La parade (qui n'est en aucun cas la suite de la visite de la fanfare comme la publicité mensongère voudrait le faire croire)- El Estudiante (ce garçon est vraiment très mignon mais on n'a pas grand chose à faire des magouilles d'un Streber, comme disent joliment les Allemands)

5 février 2013

la Хованщина, de Moussorgsky

Un grand opéra de Moussorgsky jamais vu jusqu'ici, ne boudons pas notre grande joie. Retenons que spasiba signifie aussi "Dieu vous garde" et souvenons-nous de ceci:

  • Acte I. Le prélude (sublime solo de clarinette). La grande scène entre le scribe (un intellectuel, forcément ridicule) et le boyard manipulateur (ça gargouille avec des enchainements harmoniques sépulcraux aux cuivres, en sous-main; je fonds). L'irruption d'une allemande luthérienne (forcément l'Antéchrist, rythmique échevelée et lyrisme à la Verdi) qui rend fou un prince russe (qui lui court après comme un chien de cartoon). L'extraordinaire fin de l'acte (avec les cloches: fa# + accord de do). Les vieux-croyants ne vont peut-être pas gagner la bataille mais Moussorgsky leur donne la plus belle musique. 
  • Acte II: le trio de ceux qui vont perdre: Golitsine (un réformateur, amant de la tsarine, paranoïaque), Khovanski (le chef des milices des archers, les streltsy) et Dosifei (le chef des vieux-croyants). Musicalement, le plus beau moment est, je trouve,  le numéro de divination de Marfa.
  • Acte III (chez les vieux-croyants): la chanson de Marfa, la réplique de la mère supérieure. L'air de Chaklovity (pendant lequel j'ai dormi). L'air de Kouzka (l'homme à la balalaïka).
  • Acte IV (la liquidation des streltsy): celui avec des danses persanes très peu exotiques et très peu colorées. On se réveille quand un boyard reprend d'un ton sarcastique le chant des suivantes qu'il vient d'interrompre après avoir assassiné le maître de maison (qui ne chante pas très bien, il faut l'avouer).
  • Acte V (la mort des vieux-croyants): celui avec le motif à croches continues à l'unisson (il faudra que j'analyse un jour comment un flux continu de croches suffit à me mettre en transes). Beau choeur final, mais je préfère tout de même et de très loin cette version-ci, que je comprends avoir été réécrite par Stravinsky.

 

22 janvier 2017

Lohengrin à la Bastille

* Toujours et encore la même chose. Pas mon Wagner préféré, malgré les beaux choeurs, le talent pour les musiques d'ambiance (avec un excès de violons dans l'aigü). 

* Décidément, j'aime beaucoup cette scène 1 de l'acte II, qui annonce la Tétratogie (invocation des dieux teutons; stratégie de prise de contrôle à distance de l'ennemi en lui coupant une phalange; serment à l'unisson soudant un couple fatal). Et je suis fasciné par ces quelques mesures en éventail qui ouvrent cette séquence, montée des basses, descente des aigüs: un coup de ciseaux des Nornes, beau comme du Moussorgsky. 

* Evidemment, l'attente fiévreuse d'Elsa à l'acte I est un peu celle du spectateur: le MeilleurTénorDuMonde va-t-il nous honorer de sa présence? chantera-t-il bien comme il faut pour rejeter le MéchantMontéParSonOdieuseEpouse dans les ténèbres? Va-t-il retomber malade à force de se promener pieds nus? (pire, de barboter dans un pédiluve à peine chauffé....) On a bien quelques doutes, mais on est captivé comme jamais par l'aveu final, sublimement susurré à chacun d'entre nous, ses SpectateursExtasiés.

 

 

7 mars 2016

Schubert au Wigmore Hall

Enthousiasmant récital Schubert d'un jeune baryton, Benjamin Appl (qu'il ne faudrait pas confondre avec Peter Pears), aux nombreuses qualités: talent de comédien (le Trinklied D888...) et de diseur, ironie à froid de celui qui a l'air de ne pas y toucher. Au programme, seize Lieder, depuis Adelaide D95 (qu'on ne trouve pas que dans la famille Beethoven) jusqu'au Chant du cygne (Herbst et deux bis, Ständchen et das Fischermädchen), en passant par quelques Lieder très connus (An Silvia, par exemple). Quatre découvertes (ou redécouvertes): 1/ Der entsühnte Orest, que Appl prend très lentement, très impressionnant, plus comme Fischer-Dieskau que Prégardien que j'avais dans l'oreille 2/ Fülle der Liebe (plénitude du timbre, même si Graham Johnson joue très- trop?- fort ces accords pleins); 3/ der Einsame (dont je me rends compte qu'il est un lied très fréquenté) 4/ An die Laute (qu'Appl chante avec davantage d'ironie - Nachbarn aber, Nachbarn nicht! - qu'ici, Wunderlich)

31 décembre 2015

Vus en 2015

Pas écrit sur mon blog cette année, mais vu 85 films:

Mon amie Victoria (le film de Civeyrac avec une petite noire), Queen and Country, Loin des hommes (western algérien avec Viggo Mortensen), Foxcatcher, The smell of us (du Clark qui pue), Phoenix (mélo magnifique où la reconnaissance passe par la musique), Pasolini, Les nouveaux sauvages, Snow Therapy (Strindberg fait du ski), Amour fou (Kleist se suicide), Mon fils (Eran Riklis), Les merveilles (exemple typique de film pour lequel la critique perd la tête), Toute première fois, Réalité (le king Dupieux), Le dernier loup, Hungry Hearts (Adam Driver sauve son fils affamé de sa mère Alba Rohrwacher), Citizenfour (Snowden santo subito), L'art de la fugue, Le cercle (les associations achriennes de Zurich), Imitation Game, Big Eyes, Anton Tchekhov 1890, A trois on y va (avec Félix Moatti), La Sapienza (Green minaude en jouant au chrétien d'Orient: pathétique), Un homme idéal, San Francisco 1985, Journal d'une femme de chambre, Histoire de Judas, Un taxi à Téhéran, Caprice, Jauja (Viggo Mortensen en Patagonie), Les Terrasses (un film algérien à sketches particulièrement sombre), La tête haute, Le labyrinthe du silence, La loi du marché, Trois souvenirs de ma jeunesse, L'ombre des femmes (un beau Garrel avec Clotilde Courau), Casa grande (la banlieue sud de Rio), Comme un avion (Podaydès au fil de l'eau), Los hongos, L'éveil d'Edoardo (le phymosis de Duduche à Pise-plage), Vice versa, Mustang, Stand (la condition gay en Russie, un film particulièrement pénible), Une seconde mère (avec Regina Casé, cette actrice carioca qui casse la baraque), When we were young, Que viva Eisenstein (me voilà réconcilié avec Greenaway), Les bêtises (mauvais, mais avec Jérémie Elkaim et Anne Alvaro), La Isla Minima, Aferim, Amnesia (Schroeder à Ibiza, personnel, passionant et raté), La famille Bélier, Whiplash (vu dans l'avion et à oublier), La femme au tableau, La belle saison (celui avec Izia H), La vanité (le Baier avec Carmen Maura), Natur Therapy (branlette norvégienne), Much loved, Songs My Brothers Taught Me (puissant), Fou d'amour (Ramos/Poupaud/Uruffe), Life (Dean et son photographe, bien et froid), Cemetery of Splendour (pas aimé, désolé), Les deux amis, Testament of Youth, Fatima, Sangue del mio Sangue (deux demi Bellocchio, dont un raté), Marguerite, Une jeunesse allemande, The Lobster, Dope (tchatche torride à LA, une scène de vomi déclenche l'hystérie dans la salle), Le bouton de nacre, L'homme irrationnel, Le fils de Saül, Les anarchistes (vu le 13/11 à la séance de 20h15), Francofonia (vu le 20/11 à la séance de 20h05), L'hermine, Mia Madre, Chant d'hiver (très mauvais Iosseliani hélas, toutefois mieux que la soirée électorale des régionales), Back Home (le film de Trier moins mauvais qu'attendu), 21 nuits avec Pattie, L'humour à mort (le film sur CH où presque aucun journaliste n'a voulu témoigner), Le grand jeu (Tarnac Boulin Battisti, chaque scène est impeccable mais l'ensemble chimérique), Le dernier jour d'Itzhak Rabin, A peine j'ouvre les yeux (unhappy end en Tunisie), Le pont des espions, Au-delà des montagnes (le JZK avec l'éternel retour du chien et des raviolis, un film prometteur pour 2016)

30 novembre 2007

En blanc et noir

Une oeuvre de Claude Debussy, en 1915.

 

Sans doute l'un des Debussy que je préfère, c'est difficile d'écire dessus, cette musique file plus que toute autre entre les doigts.

Plein de fausses pistes: En blanc et noir suggère quelque chose de tranché(e), alors que cette musique est indécise, pleine d'humeurs, schumanienne, gongorienne, baroque en diable: le gris de Vélasquez plutôt qu'un blanc et un noir bien contrastants. La dédicace au lieutenant Charlot (" tué à l'ennemi "), la frénésie chauvine de Debussy à l'époque de la composition pourraient laisser imaginer que c'est une oeuvre de guerre, une machine contre les Boches (comme la bataille du lac Peipous dans Alexandre Nevsky de Prokoviev), mais même le second mouvement où l'on trouve directement le théâtre des opérations est traversé de moments hédonistes; et ce tombeau est entouré de deux caprices, l'un solaire, l'autre lunaire. Les citations épigraphes laissent imaginer une musique à action, à programme, mais quel programme ? (1- la Belle Epoque; 2- la Guerre; 3- l'après guerre ?). Le Debussy de cette époque est travaillé par le retour au XVième siècle, et on entend de la monodie, de la chanson française ancienne dans En blanc et noir, mais c'est aussi une de ses musiques les plus modernes, l'une de celles où il renouvelle le plus complètement la notion de forme. Une musique écrite par quelqu'un qui se sent au bout du rouleau (“Alors j’ai écrit comme un enragé, comme quelqu’un qui doit mourir le lendemain matin” écrit Debussy dans une lettre du 14 octobre 1915) alors que ce qu'on l'entend est tout neuf, plein d'énergie vitale.

Premier mouvement dédié "à mon ami A. Kussewitsky" (en fait c'est bien Serge, le chef d'orchestre). La citation de Barbier & Carré "Qui reste à sa place / Et ne danse pas/ De quelque disgrâce / Fait l'aveu tout bas" renvoie au théâtre (des opérations) et à la danse; ça valse ! La musique sonne comme une étude sur les hémioles (la division de deux mesures à 3 en 2+2+2) et les accords de sixte (comme dans les Etudes: ces accords sont partout, on ne s'en rend pas compte car ça ne fait pas système). J'aime la première apparition des appels de cor qui prolifèrent partout (à 2'50"); le moment où les deux pianos sont à l'unisson, comme une bombarde bien ethnique (à 1'53"); le tuilage avec ce qui suit (très décadent) et ce qui précède (une valse qui s'essouffle) est particulièrement succulent. Tout le mouvement baigne dans un do majeur euphorique, dans une atmosphère de tourbillon Belle Epoque.

Second mouvement (à 3'58" dans l'enregistrement ci-dessus); dédié "au Lieutenant Jacques Charlot tué à l'ennemi en 1915, le 3 mars". C'est à ce même lieutenant Charlot, le cousin de l'éditeur Durand, que Ravel dédiera le Prélude du Tombeau de Couperin, plus tard. Le début est une musique inouïe: on tend l'oreille, on perçoit un tortillon en tierces, chromatiques, pianissimo qui descend, interrompu par un glas, un do asthmatique, rythmique qui jure affreusement mais pianissimo, puis un grand accord dissonant qui fait clash et n'empêche pas le glas sur do de continuer. Il se passe ensuite des tas de choses dans cette première partie très calme, on entend entre autres un chant populaire, mais complètement décoloré, tout blanc, en do majeur sur un fond de sol#, puis une séquence qui évoque la Terrasse des audiences au clair de lune (en ré, à 5'27") .... A 6'58, changement de climat, c'est la guerre qui approche (en mi bémol): le do rythmique du début envahit tout, au-dessus on entend un thème agité, en secondes (comme un bruit de ferraille mat), puis la lutte entre des bribes du choral Ein Feste Burg ist Unser Gott et un motif plus gallican. A 8'25", ça tourne bien, on passe en mi majeur. A 8'45", Debussy signale le retour du mouvement du début. La musique se calme, cite les épisodes de la première partie, dans un écrin monumental qui m'évoque Stravinsky, avec ce sol-do-mi-mi-do de monument aux morts, sur des accords acides, un soleil d'hiver, de désastre.

Troisième mouvement (à 10'32") dédié à Stravinsky (celui de Zvezdoliki, sans doute) un caprice, une musique lunatique ("Yver, vous n'este qu'un vilain"). J'aime particulièrement toute la fin, et notamment ce passage à 14'16'' où un air diatonique se superpose à un trille cafardeux, en gamme par tons. Il faut vraiment un effort d'imagination pour comprendre que l'on est en ré mineur....

11 septembre 2005

Sibelius: 4ième symphonie en la mineur, I.

Une symphonie clé dans l'oeuvre de Sibelius, qui date de 1910-1911, une période de rupture dans le discours, comme pour Schoenberg ou Mahler. Une symphonie que j'ai longtemps trouvée dure à cuire et à digérer, un peu comme les deux sonates violon et piano de Bartok que j'ai longtemps détestées avant de les trouver indispensables à l'écoute. Ne pas se laisser impressionner par une première écoute.... Ce qui peut décourager dans cette musique peut aussi finir par plaire: l'austérité du propos, le sérieux des mouvements lents (n°1 et 3), la fuite à la lisière de la tonalité, la couleur sombre dans les graves, le goût pour la monodie, le fonctionnement à l'économie. Mais c'est sûr, avec ce Sibelius-là on rigole moins que chez Haydn.

Ces notes prises après avoir remis le nez dans la partition sont un guide d'écoute du premier mouvement (ici dans la radio), sans doute trop technique et je m'en excuse d'avance. Je suis un peu frustré par la plupart des commentaires que j'ai lus, qui n'insistent que sur la modernité de cette symphonie, l'omniprésence du triton. C'est vrai mais c'est réducteur. C'est l'oscillation entre tonalité et atonalité, le jeu sur leur frontière qui est le véritable moteur de cette musique.

Ce que je comprends de la forme: c'est une forme sonate en deux volets (4'58" étant le pivot). Avec un mouvement harmonique, dans la première partie, d'un mélange de gamme par tons et de la mineur (c'est une symphonie "en la mineur", écrit Sibelius) vers un fa# majeur qui joue le rôle de la dominante dans la sonate classique; la deuxième partie revenant au mélange de la mineur et d'atonalité du début. Et dans chaque partie, une phase centrale d'"action", un peu alchimique et mystérieuse, permettant la transformation d'un matériau indistinct en un matériau polarisé et ordonné (résolu, on dirait en termes de langage sonate)....

Le matériau du début (a), exposé dans les graves (ambiance de Pelléas dans les souterrains):

do-ré-fa#-mi, sans polarité tonale, expose un fragment de la gamme par tons (rappel: la gamme par tons est cette échelle qui, transposée ou translatée comme vous voudrez, ne change pas). L'intervalle maximal (do-fa#) est précisément ce triton qui coupe l'octave en deux; et annonce aussi le trajet du do liminaire vers le fa# majeur qui conclut la première partie. Un tortillon de gamme qui finit par osciller, en ralentissant, sur fa#-mi. Première source de désarroi de l'auditeur: quel est donc ce matériau qui se torpille tout seul, qui n'arrive plus à avancer ?

Ce matériau prend son sens superposé à un solo de violoncelle (à 39", mesure 6), qui définit un autre espace, tout en prolongeant le précédent : sol#-la-do-mi définit clairement la mineur (l'accord parfait) tout en prolongeant la gamme par tons (sol# succède à mi-fa#).

Ce thème de violoncelle solo est plus folklorisant, moins naine blanche que celui du début. Je l'appelle thème par tierces (b), puisque il énonce des tierces liées par deux. Il finit par se démultiplier et se combiner avec la gamme par tons.

A 2'27, coup de tonnerre, coup de semonce des violoncelles: fa#, superposé à do# (totalement étranger au discours précédent) annonce fa# majeur. On rentre dans une phase d'action que l'on pourrait appeler "Les Temps aventureux" (parce qu'en ce moment on voit du Graal partout), avec des événements très repérables: une montée chromatique avec des soufflets aux cuivres (2'29" puis 3'03"), commentées par une transformation du thème (a) aux violons (2'41" avec le triton bien repérable puis 3'15"), un appel de chasse aux cors (3'29" puis son écho) et une fanfare à la Parsifal (3'45"). On conclut à 3'52" sur le thème en tierces (b), en fa# majeur A 4'26", retour du thème (a), apaisé, ayant perdu sa charge d'atonalité....mais la retrouvant.....

Ce qui suit est une section de développement très stricte autour de (a) (la gamme par tons) et (b) (les tierces majeures, forcément), de plus en plus fiévreuse. Autant le début ralentissait, autant ici on accélère, on détimbre, on désincarne et on file dare-dare vers le néant.

A 7'15", retour des Temps aventureux, avec la même séquence d'événements (par exemple, fanfare à la Parsifal à 8"00) décrite à 2'29", mais en la majeur. Retour de la belle séquence en la majeur à 8'10", qui réexpose les tierces: (a) affadi puis revigoré, mais sans triton: mi-fa#-la-sol.

Conclusion incroyable: Sibelius concatène la formule du début (do-ré-fa#-mi) à une formule finale qui réintroduit le triton (mi-fa#-sib-la). Les dernières notes exposent toute la gamme par tons (do-ré-mi-fa#-sib) moins sol# remplacé par la..... La boucle est bouclée: Sibelius a réussi à résoudre son mouvement dans cet hybride de tonalité, mi gamme par tons mi la mineur. Et réussi à rester dans l'ambigüité, jusqu'au bout

18 juin 2009

Pastorale, de Pesson, au Châtelet


 

Ce que l'on a aimé:

  • l'orchestre, qui sonne vraiment bien (on n'est pas sûr d'avoir entendu "de la cuisine moléculaire sans boeuf ni carotte");
  • tous ces bruits délectables (plus Kagel ou Ravel que Lachenmann);
  • le fait qu'on entende et qu'on comprennne bien le texte (les chanteurs sont rarement submergés);
  • les petits moments de pastiches (la joute entre les deux chanteurs mâles, par exemple),
  • le goût de la citation (on a entendu du Daphnis, d'autres moments plus L'Enfant et les sortilèges, évidemment, de l'adagietto de la Vième de Mahler, un moment-Pelléas et un moment Ariane acte II ("les oiseaux dans les arbres, dans les grands peupliers");
  • le fait que ça ne se prenne pas au sérieux, qu'on rigole franchement;
  • le fait qu'il faille tendre l'oreille et qu'on ne soit pas saoûlé par de l'hystérie à jet continu;
  • les voix starac (quelle pêche);
  • l'affiche (qui décrit très exactement l'idée de la fin (ben quoi! faut pas mollir, les gars))

Ce qu'on n'a pas aimé:

  • quand l'orchestre ronfle, respire (Grisey fait ça tellement mieux; là c'est un peu maigrichon; de façon générale, les effets sont toujours un peu en deçà des attentes);
  • la fin (ce reset cynique, là où Rohmer mettait un miracle, le travestissement qui faisait éclater la vérité);
  • la vocalité un peu grise (et manquant de variété ....pourquoi deux voix seulement sont starac et pas les autres ? pourquoi les voix chantent-elles tout le temps avec une vocalité d'opéra alors que l'orchestration est fraîche et inventive?);
  • le public, déchaîné à la pause contre le spectacle (ce qui m'a permis d'avoir une vraiment très bonne place);
  • l'acte III (au texte fumeux, le plus télévisuel);
  • le côté Bruckner (c'est parfois très ch**nt)

Add: palpatine n'a pas aimé les nymphirmières; Papageno n'a pas trouvé les Beeeh bêtes; bladsurb a aimé même s'il est plus nouvelle star que starac

3 avril 2009

The rape of Lucretia, de Britten

 

Si vous n'avez rien de mieux à faire, il faut aller voir The rape of Lucretia ce samedi à 15h au CNSMDP: c'est spectaculaire (on est de plein pied avec le chanteurs et les musiciens dans l'espace Fleuret), c'est très bien chanté, que des voix fraîches et puissantes (le coryphée homme, Cyrille Dubois ... magnifique), très bien joué (le Tarquin a une présence physique terrible terrible) et, ce qui ne gâte rien, c'est gratuit.

Il va falloir que je réécoute cette belle oeuvre que je découvre ce soir, en commençant par

  • le duo Tarquinius/ Junius, à l'acte I, véhément et théâtral
  • la bizarre chevauchée de Tarquinius: peut-être une montée du désir, mais aussi alors vraiment bancale, et interrompue par le Tibre, qu'il s'agit de franchir, comme le Rubicon.
  • la musique des femmes qui ouvre l'acte II
  • la grande chaconne qui suit la mort de Lucrèce, avec ces rythmes pointés (is it all?) qui s'évaporent.... (que je trouve plus sublime que la musique qui précède le récit de Lucrèce)

9 mars 2009

Sors, Hareng, sors! (Albert Herring, de Britten à l'Opéra-comique)

 

Du Great Britten (comme dit le chat). Une adaptation du Rosier de Madame Husson de Maupassant: l'histoire d'un fils à sa maman, choisi comme lauréat d'un prix de vertu en l'absence de candidate convenable (ben alors! les filles!) par les membres d'une sorte de ligue de vertu locale; mais ce prince Albert élu comme Queen King of May tourne mal et claque l'argent du prix en libations (heureusement hors champ). Intrigue un peu ténue, comédie à la fois triviale et réaliste (c'est une histoire d'épicier), mais pas dépourvue d'ambition et dans laquelle Britten a mis, je crois, beaucoup de lui-même (ce qui n'est pas nécessairement une garantie de réussite).

L'histoire d'une libération, donc, l'une des oeuvres les plus solaires, assertives de Britten, qui vient alors d'emménager avec Pears dans le Suffolk de son enfance, à Aldeburgh. C'est un opéra de chambre: orchestre de chambre réduit mais très virtuose, grande distribution vocale (13 solistes, une troupe au complet!). Sous-texte musical particulièrement riche, véritable festival d'opéra qui convoque Purcell, Mozart, Rossini, mais aussi Tristan et même Pelléas.

Tout le début a un petit côté opéra dans l'opéra avec une collection de mariolles gratinés, une diva sur le retour, une gouvernante pimbêche, une institutrice roucoulante et un maire qui chante à toute vitesse. Tout change avec Albert. Qui change lui-même grâce à un philtre concocté par un couple d'amoureux (qui lui veulent du bien); c'est avec la citation exacte de l'accord de Tristan que l'opéra quitte le registre de la comédie bouffonne pour retrouver une tonalité plus noire, plus existentielle. Le destin d'Albert se joue dans la deuxième scène de l'acte, avec un tirage au sort complétant l'effet du philtre (et on se souvient de l'effet de diversion d'un banc de harengs qui améliore un tirage au sort crucial dans Peter Grimes). Le dernier acte est celui de la vraie-fausse mort d'Albert et multiplie les références funèbres (grand air mahlérien de Nancy, grand thrène à neuf voix). Si la mise en scène tient à ramener Albert à la cave, la musique, elle, est pleine d'optimisme sur l'émancipation d'Albert....

4 extraits en bonus:

  1. Quand il est question d'Albert, pour la première fois ... un moment que je trouve schubertien (à 50" du début), où le superintendant décrit Herring comme un garçon "aussi propre que les foins qu'on vient de couper".... à la fin de la piste, un ensemble un peu kitsch avec harpes et gloss où le vicaire chante la pureté:
  2. le moment Tristan. Après les toasts et l'hymne, l'effet du philtre....(à 90")
  3. le moment Pelléas: au début Nancy se sent coupable de ce qui arrive à Herring (rappel fugace du moment Tristan) mais, après un petit duo en canon avec Sid son amoureux, on passe aux choses sérieuses, comme dans Pelléas, les amoureux discutent de savoir s'ils doivent s'embrasser dans l'ombre ou la lumière: accords de neuvièmes qui finissent en glissando, comme dans un turboréacteur, réussissant à faire chanter les deux chanteurs à l'unisson....(ouf)
  4. le thrène en forme de passacaille sur le texte de la Mort de la reine Mary de Purcell

 

3 juin 2008

Iphigénie en Tauride, de Gluck

 

Vu les deux premiers actes au dernier rang du poulailler, où il fait une chaleur de bête (si j'osais, tauride), à côté d'un monsieur rencontré sur Internet (et à côté de qui j'avais vu cet Idoménée). Vu les deux derniers actes en fond de premières loges avec un autre monsieur (quel volage fais-je). Le fond de premières loges, c'est mieux.

Gluck, moi j'aime. Sur Iphigénie en Tauride, tout ce qu'il y a à savoir est dit ici, et bien.

Mes moments préférés: l'air d'Iphigénie acte II (Ô malheureuse Iphigénie ! ), l'air d'Oreste et la réponse de Pylade (Degout et Beuron forment un beau couple d'opéra, l'un avec sa voix de fauve blessé, l'autre avec sa voix de Pelléas très claire); l'air d'Iphigénie à l'acte IV (Je t'implore et je tremble, ô déesse implacable !)

Musique efficace, souvent décalée par rapport au texte (comme dans le Desplechin l'autre jour, quand Deneuve sort je ne t'ai jamais aimé à son fils sur un ton particulièrement frivole). J'entends l'air de désespoir d'Iphigénie à l'acte II comme une entrée dans un jardin des Délices, un moment de bonheur exaltant, décuplé par les solos des vents. Dans le moment hyperconnu où Oreste chante Le calme rentre dans mon cœur alors que la musique s'agite en syncopes, c'est vrai, la musique s'agite, mais c'est de la musique de chambre, on est à un moment où la densité ochestrale baisse fortement. Si la nature des émotions ne colle pas au texte, l'intensité des émotions, elle, est respectée par Gluck. Mise en scène conforme à cet esprit de Gluck, très réussie de ce point de vue du respect des intensités et du contraste avec le texte. Par exemple cette scène où le grand-prêtre s'excite contre Iphigénie (et où l'on voit un torero lancer des fleurs sur une diva, con tutta forza, vas-y prends toi ça dans les dents poulette) ou le choeur final de l'acte II (Que de grâce, que d'attraits), une musique trèsmezza voce et un peu apprêtée pour un morne five o clock tea dans une maison de retraite

17 mars 2008

The Rake's Progress, d'Igor Stravinsky

  • Fascinant dernier tableau, figuration de l'au-delà, petit théâtre dans le théâtre où un fou décati chante le rôle d'Adonis, avec force ornements et roulades. S'il est vrai (théorème) qu'il existe une musique du temps suspendu dans chacune des oeuvres de Stravinsky, on la trouve sans doute ici dans la berceuse de Ann/Vénus, avec intervention du choeur.

  • Deux airs tristes: celui de Tom (où weeping rime avec dying), celui d'Ann (celui de la lune froide). Beau comme du Tchaïkovsky.
  • La Dame de Pique chez Stravinsky: la scène des cartes (Dame de Coeur et Deux de Pique) évidemment, mais aussi les enchères, le souvenir du XVIIIième siècle (celui de Don Giovanni).
  • Chez Py, des échelles et des escaliers; du coup, j'entends différemment le petit couplet de Tom sur la prédestination, au début.
  • Toby Spence magnifique de bout en bout. Laurent Naouri est un diable élégant qui m'a fait moins peur que Willard White dans la production Sellars/Salonen de 1996 au Châtelet (à l'époque où c'était encore une maison d'opéra).

21 février 2008

Thésée (1675), de Lully

Hier soir, au Théâtre des Champs-Elysées. Une des premières tragédies lyriques françaises. Le genre de spectacle où je me serais ennuyé à mourir il y a encore 10 ans. Comme quoi il suffit d'un peu d'obstination, et en 38 ans, on parvient à apprécier n'importe quoi. La partition est rarement émouvante et inoubliable mais mais mais.... elle est toujours intéressante. En découpant chaque scène en petites unités dramatiques, on finit par être étonné par la variété des situations, des discours, des instrumentariums. Le plus réussi n'est pas tout le bric-à-brac de la tragédie à la française - Charpentier fera bien plus terrifiant avec le personnage de Médée, peu de temps après, - mais les scènes plus quotidiennes, vivantes et si humaines: récitatifs décrivant des négociations un peu corsées, scènes de comédie entre seconds couteaux (la très belle scène finale, si peu guindée, avec Jaël Azzaretti; le duo de grotesques avec accompagnement de bassons, à l'acte III). Lully réussit avec éclat les scènes de réjouissances un peu officielles, avec cuivres, timbales et le relief qu'apporte le choeur (je me suis un temps demandé où il se cachait). Côté voix, je dois avouer avoir été horriblement déçu par la von Otter (que j'aime infiniment dans d'autres répertoires); j'ai trouvé ses pianissimos de fausse Barbara chichiteux, son registre de magicienne est bien pâlot à côté de ce qu'auraient fait une Mc Nair ou une Hunt; enfin, son français était rigoureusement incompréhensible, tout comme celui de Paul Agnew (et on se demande vraiment pourquoi le TCE n'a pas surtitré le spectacle). Les nombreux seconds rôles étaient en revanche tous magnifiques (notamment Azzeratti et Haller). L'orchestre était pléthorique (2 clavecins, une dizaine d'altos si j'ai bien compté) mais il semble que c'était le cas à la création. Direction pleine de punch, sans baguette, tout en souplesse du poignet, de la belle Emmanuelle Haim (tombant la houppelande à poils de bêbête après le premier entr'acte). Mise en scène décidée à bien mettre dans le crâne du spectateur que Thésée = Louis XIV (Oui, chef ! Bien reçu, chef !). Costumes réussis, décors douteux (un parquet en miroirs noirs, une overdose de références à l'histoire de la peinture). Public connoté sociologiquement (beaucoup de mecs de la finance), nombreux et enthousiaste pour soutenir la jeune création française (héhé).

27 mars 2009

Falla Ginastera Bartok à Pleyel

Joli concert (merci à Klari).

Troisième concerto de Bartok : pas vraiment convaincu, direction d’orchestre pachydermique, orchestre flottant et ne se trouvant que dans le troisième mouvement. Je n’avais jamais remarqué à quel point le mouvement lent (avec son canon en quartes descendantes) est un hommage au subliiiiiiiiiime opus 132 de Beethoven. L’extrême fin du 1er mouvement (avec le solo de flûte) est un modèle d’humour et d’élégance, beau comme du Haydn.

Variations concertantes de Ginastera. Une œuvre très plaisante, qui ne fait pas mentir son titre, mettant en valeur les principaux instruments de l’orchestre. Le thème au violoncelle accompagné par la harpe (qui scande les cordes à vide de la guitarre) est repris plus tard à la contrebasse solo (mais sans la spectaculaire grimpette dans l’extrême aigü).

L’amour sorcier, de Manuel de Falla. Version avec une cantaora, une chanteuse de flamenco…. (ça fait un choc, mais amorti pour moi car je me suis rendu compte que j’avais à la maison le disque avec la même chanteuse et le même chef). C’est drôle de la voir battre des mains discrètement, pour retrouver les pulsations irrégulières du cante jondo. Musique de transe, spectaculaire. Tout est magnifique mais j’ai un faible pour la chanson du feu follet en forme de buleria avec ces accents irréguliers drôles à voir, car une bonne partie de l’orchestre ne joue que cela et il s’agit de ne pas les rater (*stresssssssss*):

Ce morceau rappelle El Polo, la pièce d'Iberia d'Albeniz que Messiaen aimait tant:

C’était la première fois que je suis placé derrière l’orchestre et c’était un peu embêtant sur le plan acoustique pour suivre la chanteuse, mais 1) la vue est très belle (et on peut décerner un Raymond Barre d'honneur à ceux du public qui piquent le roupillon le plus sénatorial) 2) c’est très agréable de se sentir comme dans l’orchestre - et de voir comment la harpiste s’en sort quand elle claque une corde, comme ça a été le cas à la fin d’une variation agitée de Ginastera...

 

22 février 2009

Boulez Schoenberg à Pleyel

  • La nuit transfigurée, en version orchestre à cordes. Boulez prend lentement l'épisode hystérique au centre. La fin fait toujours autant d'effet.... je ne me souvenais pas de cette bizarre réminiscence du drame, noyée dans le sucre....


  • Concerto pour piano. Uchida, quel tempérament (mais elle n'a pas les guts de jouer ce soir sans partition). Musique étonnamment douce et chantante...


  • Variations opus 31. Première fois que j'entendais en concert. Oeuvre brillantissime, luxuriante, parfois trop. Introduction, thème, 9 variations, finale sur BACH (qui est inclus dans la série initiale, Gott sei dank). Le thème, déclamé par les violoncelles: on dirait du Elgar! (d'ailleurs le dodécaphonisme est peut-être l'unique façon de chanter en alexandrins; tous ces hexamètres, c'est au fond de la rhétorique classique.... ) Tout le confort Pullman, quoi. Boulez, toujours (inJalons)
    On sent bien qu'il a lui aussi voulu jouer avec l'opposition dialectique de la reconnaissance et de l'inconnu. Mais les fonctions tonales ne sont plus là, et si, au départ, il y a certaines caractéristiques d'intervalles qui sont, et deviennent, le symbole d'une variation, on ne peut dire que les déductions dérivées de la série soient reconnaissables. C'est donc le caractère de la variation qui va donner son unité, et nous serons en présence d'une succession de "pièces de genre" dont le critère sera, avant tout, soit la texture orchestrale, soit la pulsion rythmique, soit une enveloppe expressive. C'est pourquoi Schoenberg a tellement besoin de cette séparation entre les différentes sections qui permettent à l'auditeur de changer de "registre", et donc de se reconnaître dans la succession des variations jusqu'à la variation finale et la coda.
    Pas de bol, vendredi soir, peu ou pas de séparation entre les variations. Les variations impaires sont d'esprit chambriste. Ma préférée reste la 8ième, ce petit galop léger, bien dans la tradition de Saint-Saëns ... ou de Berg ("Wozzeck, Er sieht immer so verhetzt aus!")

 

Publicité
<< < 10 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 > >>
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Publicité