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zvezdoliki
22 novembre 2009

Allez, on remet sa perruque et on lève les jambes. Plus haut, les jambes!

Week-end strictement haendelien; je n'ai rien écouté d'autre que du Haendel en boucle, et c'est plutôt une bonne fréquentation. Je me suis interrompu cette après-midi pour voir de quoi ça parlait sur France Musique, mais j'ai pris peur quand ils ont parlé de Siberia de Giordano (OMG, il ya des gens pour s'intéresser à ça).

Haendel, donc ses vertus aérobiques (Sémélé, acte II): sautiller sur du Haendel m'a permis d'éliminer une succulente potée opportunément lorraine servie avec d'étonnants panais (le légume fashionista, cet automne).... 

.... de tressaillir sur des triples croches bavardes (Israël en Egypte, Exode)....

(He spake the word, and there came all manner of flies and lice in all quarters / He spake; and the locusts came without number, and devoured the fruits of the ground)

(apparemment, les mouches et les poux asticotent seulement les violonistes alors que - OMG -  les locustes s'attaquent aussi à nos gros amis les violoncellistes et les altistes)

(c'est qu'on apprend des choses, sur les blogs)

... puis de m'endormir du sommeil du juste (Sémélé, acte III)

(Leave me, loathsome light/ Receive me, silent night!/ Lethe, why does thy ling'ring current cease?/ Oh, murmur, murmur me again to peace!)

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27 novembre 2009

La belle Maguelonne, de Brahms

Au disque, je n'avais jamais fait attention à l'histoire, racontée hier par Eric Genovese, en français, une histoire dans laquelle s'intercalent les romances de Brahms: une belle histoire d'amour partagé et heureux; un voyage circulaire et une histoire d'appétit pour le vaste monde, interrompue un moment par un corbeau emportant trois anneaux attachés par un ruban rouge. Les deux premiers lieder sont un peu atmosphériques (notamment le second, qui doit être chanté à pleine voix) et mettent en place le décor; avec le troisième on rentre dans l'action, chacun des lieder qui suit décrivant les messages de Pierre à Maguelonne et la progression de l'intrigue amoureuse. C'est un Brahms solaire et enthousiasmant, avec une partie de piano magnifique et très riche - on est très loin de l'humeur dépressive des cycles de Schubert ou Schumann, il n'ya guère que trois lieder tristes (le 10, modulant et furieux, le 11, dépressif et décoloré et le 12, une magnifique élégie), tout le reste est particulièrement anticyclonique. J'ai eu l'impression de redécouvrir une musique que j'avais surtout écoutée au disque.... tout est très beau, mais c'est le n°8 qui m'a le plus frappé l'oreille, hier soir - avec son début équivoque rythmiquement, indémêlable, lourdement bémolisé ("Wir müssen uns trennen") et sa la fin, chantée pianissimo par Goerne, dans une ligne immense ("Senke die Zügel, Glückliche Nacht! Spanne die Flügel, Daß über ferne Hügel Uns schon der Morgen lacht!"). Fin de soirée joyeuse et impromptue: suis allé dîner avec S., que je n'avais pas vu depuis un an, une année pendant laquelle il a enchaîné un cycle schubertien complet (il mérite maintenant un grand cycle brahmsien, large et en majeur) et avec A (qui connaît bien BC et JM, quel petit monde).

(le n°8; ici, ce sont Prégardien et Staier)

10 décembre 2009

Bach/Eisler par Goerne et alii au TCE

Comme il s'agit d'un concert, intéressons nous à la chorégraphie: le chanteur s'enroule en des torsades baroques (sur glauben, par exemple) ou manque de s'envoler, tandis que la violoniste a de très subtils mouvements de rotation (on dirait qu'elle est composée de plusieurs sphères de diamètre différents posées les unes sur les autres). Les autres musiciens sont assis, un peu chavirés par tous ces mouvements (et se raccrochent souvent à l'archet de la violoniste). Au fond, quatre chanteurs chantent sporadiquement un choral.

Du Bach d'abord:

* Der Friede sei mit Dir BWV 158: une cantate très courte avec un air de bravoure pour le violon solo - qui fatigue le baryton ("Welt, ade, inch bin müde") et, bien davantage, le choeur (qui chante, détaché du monde, un choral lointain)

* Ich will den Kreuzstab gerne tragen BWV 56: celle avec l'air à envol initial (Ich will den Kreuzstab...) et le mélisme accablé (traaaaaaaaaaaaaaaagen); et aussi un bel air avec hautbois solo.

* Ich habe genug BWV82: celle comme une symphonie en trois mouvements avec une immense aria existentielle pour commencer, une allemande-berceuse au milieu, et une gigue pour finir.

L'homme à la voix engorgée et assez grise enchaîne sans interrompre (c'est la permanence de l'expérience existentielle allemande) sur un cycle de Eisler, sept chants sérieux (avec orchestre à cordes). L'épilogue est sirupeux et raté, mais le reste est intéressant, parfois spectaculaire. Goerne (que je n'avais pas trop aimé dans le Hollywood Songbook, à l'auditorium du Louvre, il y a longtemps) est ici à son meilleur et chante cette musique avec une humanité bouleversante.

12 décembre 2009

Au secours! les Bienveillantes attaquent

(Aïe! je suis victime d'une attaque brutale de didiergouxisme)

Il y a un point commun à deux pétitions qui ont circulé ces derniers jours - ici et ici - sur des sujets qui n'ont rien à voir, une combinaison curieuse d'enflure, d'arrogance morale et d'indigence intellectuelle. 

Indigence intellectuelle quand on préfère pontifier sur des généralités (les humanités, c'est bon pour la santé, comme les carottes et la piscine et puis ça rend intelligent, alors que les maths et la physique ça abrutit) plutôt que débattre du détail d'une réforme qui se traduira par une augmentation des heures de cours d'histoire géographie en première. C'en est au point qu'on se dit que c'est sans doute mieux, effectivement de réduire les heures de cours de cette discipline si ses thuriféraires en sont à ce niveau là.

Même processus à l'oeuvre contre Besset: on avoue ne pas comprendre en quoi la nomination de quelqu'un d'aussi intéressant que lui (pourquoi personne ne lui a jamais proposé un tel poste? ça me dépasse) au poste de directeur d'un théâtre public à Montpellier ferait rompre "les digues" "établies sous Malraux" (sans doute contre le faSSisme) ou serait un viol intolérable de la Blanche Mystique du Théâtre Public. On en est à un tel niveau de délire et de pose ! Pauvre Besset. Dites-le franchement, vous ne l'aimez pas parce qu'il est pédé ET bourgeois (oh! ce que c'est sale) et qu'il veut travailler avec son mec. 

31 décembre 2009

Igor et Coco (sur l'air de "L'école est finie")

Le scoop du siècle: Stravinsky a réécrit le Sacre en 1920 en pleine crise sentimentale après l'échec d'une liaison avec Coco Chanel... (pas mal vu pour un compositeur qui a toujours clamé haut et fort que la musique n'exprimait aucun sentiment)

(Kounen aurait dû aller plus loin; le parfum n°5 de Chanel dont il est tant question dans le film, je me demande si ce n'est pas un hommage de Mademoiselle Chanel au fameux n°5 de Beethoven, rien que pour faire bisquer Stravinsky qui ne devait pas porter n°5 de Beethoven très haut dans son estime).

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10 mars 2010

Les Dissonances à la Cité

Concert de l'ensemble Les Dissonances - un orchestre sans chef, qui s'est trouvé un nom dangereux (ouf, ils ne jouent pas faux). Format resserré (7/6/6/4), les cordes et les bois se retrouvent autour d'un demi-cercle de façon à établir un contact visuel direct entre 1er violon et le 1er hautbois. Mélange d'instruments modernes et anciens (flûte en bois, timbales savoureuses, cors naturels- hum). Au menu:

  • 1ère symphonie de Beethoven. En do. Dans l'introduction du 1er mouvement, magnifique clounk initial (impulsé par le hautbois, tous les musiciens respirent avec lui). Deuxième mouvement pris très vite (avec thème initial fugué, très dansant, aux 2nds violons- mais je reconnais le chef de pupitre); dans ce mouvement, il y a, avant de conclure, un moment fascinant avec des ploums tous les 2 temps aux vents et des roulements de timbales - une suspension du temps. Scherzo tonique avec trio hypervirtuose (et tortillons aux violons). Le finale est celui avec la fausse leçon de solfège. Musique tonique et galvanisante. C'est le bonheur (même si c'est un peu moins bien que la Chambre Philharmonique)
  • Quatuor Les dissonances de Mozart (quatuor Ardeo). Encore do, mais c'est un tout autre monde. A pat le clin d'oeil à l'orchestre, je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée de programmation de mélanger quatuor et orchestre.
  • Concerto pour violon de Beethoven. Dans le premier mouvement, j'ai du mal à éviter les fous rires, entre réminiscences du cradolfège  et sidération devant les mouvements de jambes du 1er violon, que l'on sent très stressé (eh oui, il faut caser ces **** d'accords dans le rubato du soliste) et qui a une variété confondante de mouvements de l'ensemble de la jambe (Mais faites quelque chose quoi! tenez lui la jambe avec une attelle! (effet secondaire, sans doute, de l'absence de chef)). Cadence étrange dans le 1er mouvement, avec piano et vents (et ça part dans des tonalités très éloignées). Leibowitz trouverait le premier mouvement localement trop lent, mais on est loin du contresens habituel dans le 2nd mouvement et le finale est très enlevé.
  • en bonus, le finale de la 7ième. Pris très très vite, avec beaucoup de panache, mais on n'entend pas assez les violoncelles à mon goût.
19 janvier 2011

Mark Padmore à Gaveau

C'est curieux comme les gens sont nombreux à aller communier dans des gros machins d'orchestre postromantique, et comme il n'y a plus personne pour aller écouter les confidences d'un monsieur seul sur scène avec son pianiste. Et pourtant, c'est tout aussi nourrissant, émouvant, impliquant.... C'était le Grand Frisson hier soir pour Beethoven et Schubert chantés par Mark Padmore. Voix claire, aigüs superbes et puissants, science magistrale de l'articulation (on sait exactement où va la phrase, quel est son relief, même si l'intonation allemande n'est pas parfaite), tempi souvent lents, permettant de bien ciseler les effets .... j'ai adoré.

Beethoven: Adelaide, Mailied, Neue Liebe, neues Leben, et surtout An die ferne Geliebte. C'est une musique plus intéressante que ce que je me souvenais, un mix solaire de Fidelio et de lieder de Schumann. Dans Adelaide (un air à accélérations successives), Padmore fait merveille dans les aigüs. Dans le grand cycle de l'opus 98, ce qui me frappe, c'est l'instabilité des humeurs, des tempis, des modes d'accompagnement....ça bouge tout le temps. Dans le deuxième lied (modulation en sol venant de mi bémol, effet boeuf que réussit aussi chouchou, évidemment), Padmore chante les deux premières strophes d'une voix blanche, ce qui rend le cri de la 3ième strophe complètement déchirant. Et la fin, où le piano chante tout seul comme un grand, on se croirait chez Schumann. (on comprend qu'il ait copié et cité cette musique, comme un fétiche).

Le chant du cygne, qu'on n'entend pas si souvent non plus... Padmore choisit de ne pas chanter davantage que ce qu'il y a dans le cahier D957, et il chante dans l'ordre du cycle (qui n'avait pas été choisi par Schubert). C'est un cycle plus composite que Le voyage d'hiver (d'ailleurs le pianiste, l'excellent Till Fellner, nous le rappelle en dépliant à chaque lied un nouvel accordéon pour éviter les tournes, jamais le même format, ça tourne au gag) mais toujours d'un niveau émotionnel incroyable, dans l'ironie ou la catatonie. Les graves de Padmore sont parfois insuffisants ("Rauschender Strom"), mais le Doppelgänger et la Taubenpost sont à pleurer. 

(sur Spotify, on peut entendre Padmore dans La belle meunière - ceci par exemple - et Le voyage d'hiver, mais pas dans le Chant du cygne. J'ai aussi un faible pour son album Britten - ceci par exemple)

23 novembre 2010

Hindemith/alto/Tamestit

Quatre sonates de Hindemith, deux alto/piano (opus 11 n°4 et opus 25 n°4) et deux alto seul (opus 11 n°5 et opus 25 n°1). Concert excitant comme rarement: ce n'est pas si fréquent de découvrir une musique nourrissante, variée et neuve. Je connaissais les deux sonates pour alto seul, mais en disque seulement, et pas du tout celles avec piano. Petit speech chaleureux de Tamestit, expliquant son attachement à cette musique (son premier disque d'alto....) et précisant le parcours du concert: les deux sonates de l'opus 11 sont encore sous les influences croisées de Bach, Debussy et un peu Brahms, alors que dans celles de l'opus 25, Hindemith trouve sa voie, marquée par une virtuosité plus canalisée, un goût pour le motorisme, les machines qui s'emballent. 

  • opus 11 n°4: en 3 mouvements, avec piano. Etonné car le premier mouvement ("Phantasie") sonne comme du Brahms, une mélodie très puissante sur laquelle se superposent des fusées de notes extrêmement rapides (comme du Debussy). La fin du finale voit l'accélération d'une formule très spectaculaire, comme une démangeaison qu'on n'arriverait pas à dominer....
  • opus n°11 n°5: celle qui sonne comme un hommage à Bach, avec une passacaille finale avec section médiane comme dans LA Chaconne. C'est aussi celle avec un scherzo à glissandi, très amusant.
  • opus 25 n°1: celle où les deux premiers mouvements pérorent sur la même formule, mais à une vitesse de défilement différente. Ensuite, deux sublimes mouvements lents (dans le III, Tamestit était vraiment magnifiquement inspiré ce soir, avec des pp à pleurer) encadrent le morceau de bravoure à 640 à la noire, une musique sauvage et qui fait sonner tout l'instrument.
  • opus 25 n°4: encore en 3 mouvements, avec piano. Dans le 1er mouvement, le piano donne le ton avec un thème très belliqueux et marqué. C'est répétitif, mais avec une grande variété de schémas rythmiques (pour ça, c'est mieux que du Steve Reich). Le dernier mouvement est très spectaculaire car les instrumentistes se font des sales coups en se coupant la parole; au milieu, une étonnante section où l'alto tricote, mezza voce.

En bis, une Méditation, toujours de Hindemith, mais des années 30 (plus en ligne avec ce que je connaissais du compositeur)

2 mars 2011

deux orchestres et un triple concerto

Avec (et grâce à) Klari, au conservatoire. Les deux orchestres sont le Southbank Sinfonia et des membres de l'Orchestre des Lauréats du Conservatoire. Addition, puis soustraction (heu, qui reste, au juste? ah, les joies de la fusion) pour Mozart, car la formation utilisée pour jouer la 38ième symphonie (cordes par 3 si je me souviens bien) est vraiment étique (et dangereuse). Programme fougueux et juvénile qui se mange sans faim: Les Hébrides, la symphonie Prague puis le triple Concerto de Beethoven, qui me fait toujours autant d'effet (un Mac la bémol: deux mouvements d'un do majeur solaire et assertif enserrant un movement lent en lab, contemplatif et lunaire) (j'aime bien aussi les moments IRCAM, comme les altos qui frottent à la seconde du violoncelle solo lors de son entrée). Première fois que je vois le trio en avant scène, avec le chef et l'orchestre derrière, assez loin. Cela marche bien comme ça. Excellents solistes, avec une mention spéciale au violoncelliste solo, qui a la part belle dans cette partition. 

10 mars 2011

Beethoven Berg à Pleyel

Beethoven: Ouverture de la Consécration de la maison. Commence par des portes qui claquent. On entendra aussi un solo redoutable de basson, une fugue aérobique et beaucoup de nounous qui valsent. Pas exactement la quiétude d'une petite maison perdue dans la forêt viennoise.

Berg: concerto à la mémoire d'un ange. Magnifiques deux mouvements extrêmes. Le premier mouvement débute et finit par des cycles de quinte qui rappellent à tout violoniste ce par quoi tout commence. Je n'avais jamais repéré que dans le dernier mouvement, le soliste entraînait sans une grande ligne lyrique et dangereuse les violons un par un, comme le joueur de flûte de la fable. La coda du dernier mouvement est une succession serrée d'événements extraordinaires: 1/ l'appel du trombone en gamme par tons ramène, glacial, 2/ le choral aux bois sous un solo de grosse caisse, souterrain, terrible; 3 / choral qui, tombant vers le graves, est transmis aux cuivres pendant que 4/ les cordes montent une échelle aboutissant sur le sol suraigü du violon solo alors que 5/ les vents allument en désordre dispersé un accord étagé, dans une belle lumière chaude, 6/ laissant conclure violons 1 et contrebasse avec les quintes à vide (ou pas). 

Beethoven: 4ième symphonie, en si bémol majeur. Une des plus joyeuses, une des plus roboratives. Beethoven nous y fait au moins deux fois le coup de la carpette en peau de tigre. A la fin du second mouvement, le beau thème, que l'on avait vu parader accompagné d'un rythme pointé tout en muscles, est dénervé, aplati et séparé en deux: ce sont d'abord les vents (page 13) qui en exposent la ligne seule, pianissimo, raplapla; puis, plus loin, les timbales se chargent du rythme pointé, aussi pianissimo et à découvert. Après chaque aplatissement en carpette, la nature reprend le dessus. Ce sont quelques volutes des vents qui se chargent de réveiller ce qu'il reste du tigre, suscitant un crescendo formidable et un rugissement fatal.... Même topo à la fin du finale (11 dernières mesures), mais là cela ressemble davantage à une blague à la Haydn: le thème de mouvement perpétuel est soudain ânnonné aux violons semblant en découvrir les difficultés.... et hop, un petit coup de toboggan et la symphonie est terminée (et pitié, qu'on ne me parle plus des conclusions poussives des symphonies de Beethoven!)

12 août 2011

Melancholia, de Lars von Trier

Je m’attendais à quelque chose de bien, mais les dix premières minutes sont un vrai choc visuel, sur la musique du prélude de Tristan, citée in extenso. Le film oscille constamment entre deux pôles. Justine (qui n’a plus grand-chose à perdre) et Claire (qui vient plus d’Assise que de Lacoste). La comédie hollywoodienne du beau mariage qui se déglingue et le film catastrophe, traité avec la plus grande ….gravité. Le romantisme le plus pur (la lunatique qui prend un bain de minuit en s’exposant aux rayons de la planète) qui convoque les références les plus nobles et le trash grotesque (la mariée qui pisse dans un des trous du golf; ah ça, on rit beaucoup, aussi, et jaune). Le pont que le cheval ne franchira pas, le virage que la limousine n’arrive pas à négocier. La fin m’a rappelé Mario Merz. Un film magnifique.

23 juin 2011

la fête de la musique cette année (mardi)

en deux temps:

- dans une cour pavée et joliment arborée et fleurie, petit massacre de l'été (RV315 de Vivaldi) entre très bons amis. C'était fort sympathique, localement comique (comme une course d'orientation ratée), franchement moche et dangereusement tectonique: c'est chez Ligeti, pas Vivaldi que l'un peut accélérer pendant que l'autre ralentit. Vous saurez pourquoi si cet été est très arrosé, avec de nombreux glissements de terrain. 

- sous la pyramide du Louvre, à l'invitation de l'Orchestre de Paris à plusieurs blogueurs (mais c'était ouvert à tous) un Konzertstück pour 4 cors et une symphonie rhénane expédiés en 55 minutes (un des cornistes avait sans doute un biberon à donner à 23h30). Tempi d'enfer dans les deux finales, tous deux à accélération conclusive de navette spatiale (début de décollage d'une partie de l'assistance). Programme plein de bonne humeur et sentant bon les joies du plein air. Plaisir de voir le ciel et la clarté diminuer progressivement (de 22h à 23h), sans les inconvénients phoniques du vrai plein air comme à la Roque d'Anthéron (ça sonne mieux dans la pyramide, qui elle-même sonne plutôt mieux que l'oratoire (dans la famille Louvre)).

 

29 octobre 2011

Lulu à la Bastille

(vendredi soir à Bastille)

Avec Lulu, j'ai toujours parfois une impression de noyade dans un univers complexe et labyrinthique, mais j'avais lu Jameux avant, ce qui m'a permis de me repérer un peu mieux que la dernière fois (en 2003, déjà la même et excellente mise en scène).

Ce que je n'entends toujours pas:

  • les séries: c'est trop long 12 notes; j'entends Lulu quand c'est une gavotte (un affect néo-classique décrivant la moquerie contre le mariage), pas quand c'est une série; pas repéré Alwa non plus, ni Schön; la conclusion s'impose, ma vie - enfin, hein, la vie de mon oreille - est un échec affreux;
  • les palindromes: dans le magnifique interlude du 2ième acte: pas repéré le centre, le lieu où ça rembobine; il est vrai que ça va si vite.

Ce que j'entends et je repère bien:

  • les grands râles mahlériens (Schön et Jack l'éventreur, forcément);
  • la monoritmica (pam.... pam....papam, ça c'est perceptible, une séquence de quatre signes, ça va) qui sert pour la mort du peintre ET la scène avec le nègre (logique); que l'on retrouve avec les nein de Lulu, au moment fatal, et à l'extrême fin;
  • la chanson misérabiliste de Wedekind (les variations de l'interlude de l'acte III et un thème qui figure la prostitution, comme dans la scène avec l'aigrefin à Paris). (un thème de complexité zéro, ouf) 
  • les quintes de Geschwitz (qui ne sonnent pas du tout comme du Berg, c'est très bizarre)

Ce que j'ai compris (réel soulagement):

  • Ce n'est pas la peine de se mettre martel en tête à chercher à repérer les grandes formes. Il y a bien une grande arche qui traverse tout l'opéra, mais elle n'est pas stricte (par exemple, le troisième acte n'est pas la rétrogradation du premier; si Schön est le troisième mari, Jack est aussi le troisième client). La forme sonate est truffée de petites formes qui sont comme des bulles qui ne durent pas mais caractérisent un moment du texte de la pièce. Il y a l'hétérogénéité, la vie propre de la pièce de théâtre et ce qui est vraiment important, que soulignent la musique et les grandes formes (la lutte entre Lulu vs Schön, par exemple).

Très belle mise en scène (une arène, des gradins de théâtre au fond, des échelles par lesquelles communiquent ces deux mondes). Deux grandes réussites: la scène ou Lulu se débarrasse de la fiancée de Schön (avec ces lettres qui se multiplient) correspond finement à celle de la mort de Lulu (tuée par une multitude d'hommes à chapeaux).

En bref, encore deux ou trois fois à réessayer et ce devrait être bon; je finirai par l'aimer, cet opéra.

15 janvier 2012

Présences: Strasnoy/ Britten au Châtelet

Beaucoup dormi pendant les cinq Interludes de Peter Grimes (mais je me suis quand même rendu compte qu'il y avait un beau solo d'alto dans la Passacaille tirée du même opéra). Pas dormi du tout en revanche pendant le Bal, l'opéra de Strasnoy en deuxième partie, qui m'a laissé des sentiments mitigés. La musique en est très composite: il y a du bruitisme (le début), une scène de leçon de musique un peu fofolle qui fait théâtre musical, une scène très rythmique où ça swingue (avec la mère), des chansons irlandaises franchement grivoises, un passage qui rappelle Philippe Hersant, des citations attendues de Berio/Mahler et la clarinette de la scène de danse du Wozzeck. La fin avec son atmosphère de désastre est plutôt réussie. Non, le problème est plus que c'est une comédie qui arrache parfois un sourire, guère plus (la faute à qui? un texte trop anodin, entre comédie bourgeoise et surréalisme? les acteurs qui surjouent et dont la diction n'est pas à la hauteur?). Relative déception, donc.

28 janvier 2012

Salonen Bartok II, au TCE

Bartok: suite de danses, concerto pour violon n°2 et le Mandarin merveilleux (la suite, pas le ballet intégral hélas); Debussy, le Prélude à l'après-midi d'un faune (comme un cheveu sur la soupe). (et en bis, le Galop de Stravinsky - dont on se serait bien passé).

(heureusement qu'il y avait le Mandarin merveilleux....)

(Je crois qu'il va me falloir une période de jachère pour les concertos pour violons. Vous savez, ce genre musical idiot où un énergumène gigote au premier plan en vous mettant dans la vue plein de notes pour vous empêcher de vous concentrer sur ce qui pourrait avoir de l'intérêt, derrière à l'orchestre. Et puis le concerto pour violon de Bartok, je l'ai juste trop entendu, et il est trop riche en saccharose à mon goût - contrairement au Mandarin qui est bien acide, avec quelques pépins aux trombones)

(un véritable congrès de vieux-blogueurs, ce concert; riche en émotions et en révélations - j'ai enfin compris que je connaissais depuis longtemps Faustin Soglo - mais c'est que j'y ai cru, oui Monsieur, à ce masque africain)

 

20 février 2014

Lévy/ Puccini

Un week-end dernier bien occupé:

* Présences 1: Hérédo-ribotes, de Fabien Lévy. C'est l'alto qui propose à l'orchestre (51 solistes) de jouer à partir d'un matériau en modes de jeu. Une oeuvre ambitieuse (avec des cors aux balcons qui font tourner le son), mais je trouve les moments contemplatifs moins aboutis que dans A propos. La critique semble avoir bien aimé. Au programme du même concert: Henze, Widmann (une oeuvre romantique pour clarinette et orchestre) et Schneller (très éclectique et plaisant à écouter). 

* Présences 3: Après tout, toujours de Fabien Lévy. Sonne comme un grand oratorio, mais il n'ya que 6 solistes (les Neue Vocalsolisten, qui chantent cette partition avec une aisance déconcertante) et 6 instrumentistes (et une bande électronique qui se mélange très bien aux instruments; les crépitements façon années 40 étant une part importante d'une riche texture bruitiste). Grand impact des textes, plus faciles à suivre en concert avec les sous-titres qu'à la radio (Jankelevitch au Masque et la Plume, la lettre de Raweling à Jankelevitch; la réponse de Jankelevitch). Mes moments préférés: les chorals de la 1ère partie, avec la voix de coloratura qui colore le tout; le vent du début et de la fin; le théâtre musical du début de la 3ième partie (ce jeu sur vergeben/ vergebens avec le s qui dure....)

* La Fanciulla del West. L'acte I (dans le bar) est un peu languissant (malgré une valse - chorale- dans l'opéra; le psaume 51). L'acte II est beaucoup plus palpitant  et l'acte III n'est pas loin d'être un chef d'oeuvre (les derniers mots d'un condamné, une musique que je trouve extraordinaire, hybridation de la Cathédrale engloutie et du grand opéra italien). Gammes par tons, enchaînement d'accords parfaits, rythmique à la Billy The Kid, une partition exotique et éclectique. Mise en scène pertinente et beaucoup moins fofolle qu'attendu (Lenhoff n'est pas Langhoff).

4 mars 2016

Widmann/ Bruckner 9

Widmann: Flûte en suite. (comme paté en croûte, ou boeuf en daube?) 8 mouvements, comme une suite de Bach, mais on a du mal à reconnaître les rythmes de danse. La Sarabande ressemble à un ground (avec une basse qui baisse puis finalement remonte, à la fin). L'Allemande initiale utilise la flûte solo et 4 flûtes, à partir du do grave. Le Choral 2 (avec les cuivres à fond) est plus reconnaissable que le Choral 1 (avec ses nappes de son). Les mouvements les plus spectaculaires sont la Courante (très rapide, mi pastiche de musique contemporaine, mi pastiche baroque), que j'ai préférée à la Badinerie (Bach, aber auch der Feuervogel und Tristan waren dabei).

Bruckner 9: ah, le bonheur océanique de Bruckner... la répétition des petites cellules.... voir 50 personnes faire tire tire tire 15 fois de suite.... ces séquences qui vont on ne sait où (le vide de la musique avant le 2ième thème du I, par exemple). Le I: début chaotique, dominance du groupe second thème. La coda du I: pas un des plus beaux moments de Bruckner, mais un des plus impressionnants, avec beaucoup de notes étrangères pour escagasser l'oreille. Dans le II: le trio tout fou, avec les bois. L'Adagio (qui ne peut pas être final, on ne va pas finir en mi majeur une symphonie en ré mineur, voyons, cela n'a aucun sens). J'entends une fome sonate en deux parties, avec trois éléments. 1/ Le thème du début, qui déglingue instantanément le chocottomètre (violons fauves en folie feulant sur la corde de sol, neuvièmes ascendantes qui prolifèrent) et qui déconcerte beaucoup par son instabilité tonale 2/ Le grand splash jaune: tout d'un coup, la couleur à l'état pur (avec un accord dont je me rends compte après coup qu'il compacte la neuvième initiale) 3/ Le moment @didierda (long groupe deuxième thème). La deuxième fois, il se passe beaucoup plus de choses: la neuvième est renversée, le splash jaune est beaucoup plus dissonant. Je n'ai pas repéré les autocitations de Bruckner (il paraît qu'il ya le thème de la VIIème, il faut m'excuser, je débute en bruckneromanie), mais j'ai repéré un moment Thomas Tallis- Vaughan Williams (13'07" ici, mesure 165, qu'on pourrait aussi appeler moment lingette d'Amfortas tellement il fait du bien; c'est avant le retour du 2nd thème) et un moment Janacek (à 18'36'', mesure 227), avant la fin (un peu seulement) apaisée.

13 avril 2016

Messiaen Bruckner 8 par le LSO

Deux aérolithes catholiques:

Messiaen: Couleurs de la cité céleste. Piano + percussions à clavier + percusssions résonantes (cloches et gongs), cuivres et clarinettes. Court, clair, très impressionnant, et plus prenant qu'au disque. Les chorals de cuivres (très lents, succession d'harmonies froides). Trois coups très violents et très rapides. Figures de résonances. Hoquets. Fusées de chants d'oiseaux.

Bruckner 8: retrouvé un peu de tout cela mais aussi quelques moments: Le I. Le mi bémol majeur du développement (le "moment Fassbinder"): merveilleux de calme, c'est ce qui rend la récapitulation si impressionnante avec le retour d'ut mineur. La fin du mouvement est géniale d'amertume; la voisine de derrière décrète que c'est fini et commence à faire du bruit alors que les altos continuent à liquider le roulement de tambours, pianissimo. Le II: dans le moment central du scherzo, c'est la timbale qui est le fil rouge (le thème dépecé aux bois, les cordes s'affolant pianissimo). Etonnant trio, chaleureux solo des violons sur des pizz de parade de chevaux. Ce sont les harpes qui concluent (dans une de leurs rares interventions, particulièrement marquante). Dans le III: l'intervention des harpes et le tournoiement harmonique qui s'ensuit: UN REVE (mon royaume pour ces trois mesures). Le B= thème de violoncelles. Le moment où deux musiciens se lèvent (cymbales + triangle): deux interventions (je n'en vois qu'une dans la partition de 1892, mais Rattle a joué Haas 1939), un sommet puis une cadence rompue (catastrophe). La fin de ce mouvement, après la rupture - chaloupes et ré bémol majeur - est magnifique. Le IV: le début est tellement fort qu'il a tendance à tuer le reste; la coda est sans doute là pour rééquilibrer le mouvement en intensité (ça ne la rend pas aimable pour autant).

20 octobre 2017

Kurtag/ Sciarrino

C'est Kurtag qui gagne, facilement, avec. ....quasi una fantasia.... opus 27 n°1, ce chef d'oeuvre qui convoque Beethoven, Bach et Schumann, mais on y entend aussi Bartok et Ligeti. L'Aria finale est sublime. Les musiciens sont dispersés autour de la salle. Dans les Messages de feu mademoiselle Troussova, remarquable adéquation des idées musicales (souvent très simples) avec un texte court et percutant. Pour ne prendre qu'un exemple, dans le n°14, des chaînes de noires qui s'interrompent figurent les trous de mémoire du texte (Tes disparitions/ C'est comme de noirs trous de mémoire. Des non-liens dans l'action/ Mais de lien, il y en a un autre, qu'on appelle le temps).  Partie érotique (n°3 à 7) particulièrement violente (vocalises dans Fièvre, le n°3; sarcasme a cappella dans le n°5 (Pourquoi ne pousserais-je pas des cris de cochon/ Quand autour, tout le monde grogne) suivi de la musique de bastringue du n°6. De Sciarrino (Gesualdo senza parole, Il sogno di Stradella, Omaggio a Burri), c'est la dernière pièce (flûte, clarinette et violon) que je retiendrai, avec ses bruits de clapets et une musique qui tarde à naître.

6 novembre 2016

Britten/ Berlioz à l'Orchestre de Paris

Sérénade pour cor et ténor/ Roméo et Juliette: beau programme, avec des échos troublants d'une oeuvre à l'autre. On retrouve les "lulling charities" du sonnet de Keats dans le scherzo de la reine Mab, ou dans ce ground qui m'a toujours fasciné à la fin de la scène de bal, avec cette ligne qui plonge dans le grave, ouvrant la porte aux forces du rêve.

Je n'ai pas si souvent entendu la sérénade en concert, et c'est vraiment un chef d'oeuvre. Plus que les pièces de genre un peu entêtantes (Dirge - la procession - comme chez Harold en Italie; le Nocturne avec son refrain avec cor obligé), j'ai préféré ce soir Pastoral (où les aigüs très doux de Padmore ont fait merveille .... pas près d'oublier ce Till Phoebus, dipping in the west/ Shall lead the world the way to rest, à 4'30"), le Sonnet de Keats (pour les lulling charities et l'assomption finale), et bien sûr l'Elegy de Blake (où c'est le cor qui chante - trouvaille que cette seconde descendante qui revient et contamine tout - le ver dans la rose). 

 

 

Benjamin Britten: Serenade for tenor, horn og strykere, op. 31 from Bergen Filharmoniske Orkester on Vimeo.

4 septembre 2016

Bruckner / Mozart à la Philharmonie

Programme ut mineur/ mib majeur: 24ième concerto de Mozart et 4ième symphonie de Bruckner.

Gros Gänsehaut sur

- la coda du 1er mouvement de Mozart (12'58''): le piano déploie des doubles-croches comme des essuie-glaces, qui effacent ce qui reste de combat thématique, aux hautbois et aux bassons, sous l'oeil détaché des flûtes qui planent. On ne bouge plus de do, la messe est dite. Le programme dit joliment que la coda laisse l'idée initiale s'éloigner dans un flou poétique, comme un problème résolu et reporté à plus tard. C'est exactement ça et c'est sublime.

- la coda du 2nd mouvement (8'01''): là, c'est le tictac du basson, relayé par le piano pour conclure, qui est sublime (mécanique du temps qui passe?). Le reste de l'orchestre est un souple et moëlleux matelas rythmique. Un genre de moment parfait, qui s'évapore vite.

- côté Bruckner: à H dans le 1er mouvement (7'54"): au début du développement, dans une atmosphère de détente, les mécaniques déviantes lancées par les appels du cor: ce n'est pas les bons instruments qui répondent, et ils répondent à côté. 

8 juillet 2004

Nuits de Chine, nuits....


Hier, donc, concert de mon copain Fabien (purée, ce qu'il a l'air sérieux sur la photo de son site !!!!! lui qui est si blagueur). Evidemment, je suis dans le fan club donc peu objectif, mais j'ai aussi la dent dure d'habitude; je suis total crédible quand je dis que sa dernière pièce est super et m'a beaucoup plu. Le concert était mi-musique chinoise traditionnelle, mi-musique contemporaine (avec que du Fabien en contemporain): un hommage de la musique contemporaine à l'ethnomusicologie, qui inspire beaucoup de monde en ce moment (pour ceux qui ne suivent pas, Ligeti et les pygmées...).

Disons le, le clou du spectacle était la dernière pièce de Fabien, écrite avec des instruments occidentaux (orgue hammond qui vient du jazz, violon, violoncelle, harpe) et orientaux (cithares qin et flûte chinoise). Moi qui aime les schpouink et les schdouiiink (rien à voir), j'ai été servi. J'aime de plus en plus cette façon de de jouer avec le rayon bricolage du BHV dans toute son étendue. On peut sourire, mais si on y réfléchit, la musique, c'est souvent et d'abord ça, savoir jouer avec des "schpuink" et des "zilch about". Et puis, franchement Fabien, à part toi, personne ne s'est rendu compte que la cithare qin de gauche était complètement larguée.....

La partie traditionnelle chinoise m'a aussi pas mal impressionné. Pas la même pratique : c'est curieux de voir des musiciens s'accorder pendant que d'autres jouent (et les cithares qin, ça a l'air encore pire que les théorbes chez les baroqueux....ça a ses vapeurs en permanence, ça se désaccorde à vitesse V et les chevilles ont l'air bien dures). Deux grands moments: un hymne confucéen chanté en voix de tête (avec les miaulements caractéristiques de la langue chinoise); et un grand solo de cithare qin. De ce que j'ai compris, c'est une musique non polyphonique, où l'intérêt réside dans les timbres et les ornements.

Pour ne rien gâcher, c'était dans la Cité U, Fondation Deutsch de la la Meurthe, un endroit magique sous la pluie avec ses jardins, un hybride improbable entre Deauville, Calvados et Cambridge, Massachussetts, un rêve d'ailleurs en plein Paris. Bien content de revoir un bout du fan club de Fabien (que je ne revois plus depuis que F a quitté Paris), dont AB et J, toujours très chaleureux, qui m'a fait la fête.....

14 février 2004

dingue de Matthias Goerne

Mercredi je suis allé voir l'Orchestre de Paris, pour la Symphonie lyrique de Zemlinsky. J'avais deux bonnes raisons pour çà; c'est une partition avec laquelle je n'arrivais pas à accrocher (et c'est toujours mieux d'essayer le live dans ces cas là); c'est l'oeuvre la plus célèbre de Zemlinsky dont j'aime tant les quatuors (notamment le 2ième), et Berg la cite, en bonne place, dans sa suite lyrique.

En seconde approche, donc, c'est une oeuvre avec beaucoup beaucoup de notes, d'un style postromantique, mais raffinée comme celles de l'école de Vienne, et avec une pompe presque hollywoodienne pour évoquer l'Inde. On pense au chant de la Terre, mais autant je pense qu'il faut écouter le chant de la Terre comme une symphonie, en en suivant le fil de l'architecture musicale et en oubliant les voix, autant je trouve que la Symphonie lyrique gagne à être écoutée en lisant et comprenant le texte, très beau, de Tagore.

Comme la première partie des Gurrelieder, c'est une alternance de lieder de voix d'homme et de voix de femme (avec avantage à l'homme qui démarre; 4 au baryton et 3 à la mezzo). Les deux premiers décrivent la montée du désir, les 2 suivants l'accomplissement, les trois finaux la rupture. Contrairement aux Gurrelieder, il y a deux sphères bien séparées et inconciliables pour l'homme (pour faire simple, le prince travaillé par la métaphysique) et la femme (qui est plus dans la séduction et l'érotisme), avec des musiques de caractère différents. Je pense que c'est cet aspect qui a dû motiver Berg dans sa citation de la suite lyrique (dont on connaît maintenant l'arrière-plan biographique).

J'étais surtout venu pour Matthias Goerne. Il a grossi (il est presque bon pour le Bearsden:-) et il a une façon impressionnante d'extraire le souffle du torse, tout en utilisant l'ensemble du corps. Le résultat sonore est bouleversant, il a un grain de voix riche, jeune, et une diction subtile; une synthèse réussie de Prey et de Fischer-Dieskau. Je suis dingue (c'en est pathologique) de cette voix.

4 mai 2006

Siegfried (reloaded), au Châtelet

Mêmes interprètes, même production, mais je suis attentif à autre chose :

Siegfried Mime : A chaque fois que Mime introduit un thème (l'amour dans la première scène, la peur dans la troisième), Siegfried s'en empare pour infléchir le discours musical. L'amour qui, chez Mime, est mielleux devient avec Siegfried une grande idée lyrique renvoyant aux Wälsungen et à la mère inconnue. La peur, qui pour Mime est une terreur de dessin animé, se transforme pour Siegfried en le pressentiment de la conquête de Brünnhilde (programme de l'opéra), exprimé uniquement par la musique (et pas par le livret). A l'acte II, quand Mime profère à part ses menaces contre Siegfried, sur une musique de valse un peu doucereuse (avec gruppettos, un XVIIIème siècle un peu malsain), il croit que Siegfried ne le comprend pas ; grave erreur, Siegfried comprend maintenant à la fois le chant de l'oiseau (c'est pourquoi on entend abondamment son thème, déformé dans la valse) et le double discours du Niebelung, tout comme le spectateur, qui se dit que décidément ce Mime est bien bête. L'Oiseau (dans cet acte II où j'avais tant dormi) est ce passeur entre l'image de la mère inconnue et la femme qui attend dans le brasier final.

Le thème des traités = celui de la contrainte, tout court. Est cité dans le jeu des questions/ réponses entre le Wanderer et Mime, revient dans la scène terrible où Siegfried, symboliquement, tue le pèresur la route de Delphes avant d'aller coucher avec sa mère décongeler sa tante. A ce moment précis, le thème des traités est désintégré : cette gamme descendante part en vrille chromatique.

A chaque acte, l'oreille est sollicitée par des marqueurs sonores qui reviennent fréquemment. A l'Acte I, ce sont deux septièmes descendantes, particulièrement sinistres (= le destin ?) ; à l'acte II, c'est le triton du dragon, aux timbales, stable et sourd.

A l'acte III, pile dans mon champ de vision, je vois un percussionniste s'échiner sur une grande feuille de papier (comme dans Rameau), qui fait concurrence à la soufflerie du Châtelet, toujours déchaînée. Cet instrument intervient dans le prologue et dans la scène Wotan/ Siegfried, au moment où la lance de frêne du Père est sectionnée par l'épée du fils.

Les 45 minutes finales, toujours aussi assommantes, passent avec un bon chronomètre et un soupçon de mauvais esprit. Il faut 10 minutes à notre héros pour se rendre compte que Brünnhilde n'est pas un homme (Great! good boy !) ; 10 autres minutes pour surmonter sa panique (aaargh une femme, que vais-je donc en faire). Elle se réveille enfin, ils commencent par détailler leurs pedigrees respectifs, comme dans le carnet mondain du Figaro (tout va bien, nous sommes en bonne compagnie). Il la complimente sur son haleine (voilà quelqu'un qui sait parler aux femmes). Elle se définit en quelque sorte comme sa carte mémoire (toi et moi c'est pareil, mais moi je me souviens). J'exagère vraiment ?

16 octobre 2005

Les noces de Figaro au TCE

Vendredi, j'ai obéi aux ordres (qui étaient formels) et bien m'en a pris, la production du TCE des Noces de Figaro vaut effectivement le détour. Orchestre survolté, tempi rapides et nerveux, notamment dans l'ouverture qui est pourtant la seule des ouvertures d'opéra avec Da Ponte à être C et pas C barré (comme le signale Harnoncourt), mais aussi et ça c'était bien, dans l'air du Comte (le n°18, qui me plaît terriblement) à l'acte III, agressif à souhait.

Mise en scène explicite et raffinée (même en ne lisant pas les sous-titres, impossible de ne pas comprendre) poussant les chanteurs dans leurs retranchements (ils sont plusieurs à devoir chanter couchés, face aux coulisses !). Décor de musée de peinture à l'ancienne, bas de Crucifixion androgyne pour les appartements de la Comtesse, ambiance de leçon de musique hollandaise pour un Voi che sapete à couper le souffle (Chérubin à la tourne de pages et la Comtesse au clavier, interloquée par ce qui finit par sourdre du cadre de la partition), nature de peinture française du XVIIIème pour l'acte IV. Parti-pris de tableau vivant, tout pour l'action, les comédiens se figeant dans une pose statique dès que la lumière s'éteint.

Entendre l'oeuvre dans son intégralité permet aussi de repérer les grandes masses de tonalités: le changement de climat à l'arrivée de la Comtesse à l'acte II correspond à la fois à l'irruption du chant des vents et l'arrivée de mib majeur après le do majeur qui conclut l'acte I. Et de repérer les scènes de dévoilement et de retournement: le terzetto de l'acte I, le trio de l'acte II (le n°14, celui où, avant que Suzanne ne vienne retourner la situation, le Comte menace la Comtesse, avec force accords de septièmes électriques et Giudizio menaçants); et puis le sextuor de l'acte III (le n° 19), le plus beau de tous.

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